« Le christianisme culturel n’est pas l’avenir de l’Eglise », selon de le cardinal de Kesel. Et voilà une nouvelle mise à l’index, un nouvel épouvantail, sans doute parce que derrière le christianisme culturel se trouve le tabou de l’identité. Si on entend christianisme culturel comme verni de façade pour catholique du dimanche, en effet, ce n’est pas une voie d’avenir pour l’Eglise dont la vocation est d’ouvrir en profondeur les entrailles de Dieu pour que nous nous y plongions par le Christ, en Christ et avec le Christ. Pour autant, même en ce cas, que d’aucuns prennent de haut, à l’image du pur catholique chevalier blanc hérité d’une mystique de la perfection incomprise, ce verni culturel, qui peut être de la pure superstition, ou du mimétisme social ou familial est, a minima, le signe de la reconnaissance de Dieu et surtout de la place que cette Eglise, si évanescente dans la vie de beaucoup, garde pour eux. Et cela, ce petit indice, c’est, déjà, le signe que l’encéphalogramme n’est pas plat. Alors, peut-être qu’en ce sens, au contraire, c’est l’avenir de l’Eglise, pour peu qu’on se décide à évangéliser les profondeurs de ce frêle signal de vie spirituelle, au lieu de plaquer un ersatz d’Evangile. Ersatz qui lui devient un vêtement culturel pseudo-chrétien et superficiel qui, par les nombreux mensonges qu’il comporte, ferme les entrailles de Dieu, dans la mesure où ce Christ édulcoré n’est plus la vérité, ni donc le chemin et moins encore la vie.
Par ailleurs, rejeter le christianisme culturel c’est méconnaître de façon dramatique l’influence porteuse d’une ambiance culturelle. Le simple regard porté sur les impacts vertigineux de la culture de mort devrait suffire à en mesurer l’effet. Grandir dans une société empreinte de christianisme culturel est-ce la même chose qu’être plongé dans la culture du néant et du chaos ? Renforcer, défendre le christianisme culturel c’est tout autant le terreau de la terre infectée du monde contemporain qu’un rempart pour fortifier les plus fragiles. Ne pas figer le christianisme dans une culture datée par l’histoire est une évidence. Il n’y a guère que la morale bourgeoise XIXèmiste pour s’accrocher à la forme d’un temps. Le catholicisme a toujours été en constante adaptation avec le monde. Mais le véritable catholicisme s’adapte aux formes, pas au fond qu’il doit toujours donner au monde dans la plénitude de sa vérité. Le christianisme culturel est un cadeau qu’il faut, certes, parfois dépoussiérer et mettre au « goût du jour », mais il est l’argile même avec lequel le potier Eglise peut façonner les âmes, pour peu que le potier souffle bien l’âme de vie du Christ. Or aujourd’hui, sous couvert de modernité, on fustige le christianisme culturel, sous prétexte qu’il serait identitaire, pour mieux instaurer un autre christianisme culturel qui n’a de christianisme que le nom. Et là, non seulement ce n’est pas l’avenir de l’Eglise, mais c’est son suicide.