« La nouvelle tant crainte est arrivée : le Roi est mort. Les chaînes de télévision, en simultanée et en noir et blanc ont, tristement, diffusé le bref communiqué au cours de la fin d’après-midi du 13 octobre. La population est restée sans voix pendant un instant puis a éclaté en sanglots » raconte un missionnaire présent dans le pays. « Jeunes et vieux, hommes et femmes, dans les villes et dans les périphéries. Il s’est agi, et il s’agit maintenant encore d’une manifestation d’affection sincère envers le monarque plus qu’octogénaire. Son anniversaire était en voie de préparation pour le 5 décembre prochain, fête nationale des pères, mais ses conditions de santé, depuis longtemps précaires, ont décliné rapidement voici quelques jours. Ce n’est pas un Roi qui meurt mais « le Roi ». Pour la majeure partie des Thaïlandais, il s’agit probablement du seul Roi qu’ils ont connu. Il a connu le plus long règne de la planète. Il a régné pendant 70 années pleines avec une grande sagesse et une grande attention à son peuple. La monarchie, qui est encore actuellement une institution garante de la paix et de l’unité nationale, s’est identifiée avec Bhumibol Adulyadej, le 9ème souverain de la dynastie Chacri, celle qui a fondé Bangkok à la fin du XVIII° siècle ».
« La population est perdue. Les institutions se sont accordé un temps de réflexion. Le pays connaîtra un deuil d’un an après lequel auront lieu les minutieux rites de la crémation. Au long de cette année, la population, probablement presque tous les 66 millions de sujets, feront acte de révérence envers le grand souverain, considéré par tous comme le bon père de la patrie, digne d’entrer au paradis bouddhiste. La Conférence épiscopale catholique elle-même a diffusé un communiqué, lu dans toutes les églises dimanche dernier, 16 octobre. Les chrétiens y sont invités à prier pendant une année entière pour l’âme du défunt Roi et pour son successeur. Il est demandé de sonner les cloches pendant neuf jours consécutifs et d’exposer des images adéquates dans les églises et les écoles catholiques ».
En outre, ajoute le missionnaire, « les autres religions et institutions civiles font actuellement de même. Les cinémas et les théâtres ont suspendu les programmations. Les chaînes de télévision transmettront pendant un mois en noir et blanc. Les zones touristiques elles-mêmes adaptent actuellement leurs horaires et la vente de boissons alcoolisées. Les étoffes noires, devenues signe commun de deuil, sont épuisées. Dans le sentiment des personnes, ce Roi est inscrit comme modèle de bien et de miséricorde, toujours représenté en compagnie des populations agricoles, sur les monts, par les villages. Son image était déjà présente auparavant dans toutes les maisons et les salles de classe. Des gigantographies trônaient aux entrées des villages et des villes. Il a certainement eu un rôle délicat dans la conduite de cette nation au travers des cendres de la guerre mondiale et des turbulences du sud-est asiatique liées au communisme. Il a accompagné le processus de modernisation de l’Etat sans bouleverser usages et traditions. Il a favorisé explicitement la coexistence des religions dans une nation presque entièrement bouddhiste. Il a freiné certains regains de conflit civil lors des époques de crise. Maintenant, la Thaïlande, après la pause de tristesse, aura une série de problèmes d’envergure à affronter ».
Source : Agence Fides