Servir Dieu et non l’Église ? Observations sur quelques récents propos cardinalices

Servir Dieu et non l’Église ? Observations sur quelques récents propos cardinalices

Récemment le cardinal López Romero, archevêque de Rabat (Maroc), a indiqué qu’il servait Dieu et non l’Église:

https://twitter.com/ktotv/status/1762913557933359436?s=46&t=mbHqiXuBtdxhR7-3LzQQbA

Comment comprendre ces propos qui méritent éclaircissement ? D’un côté, on peut effectivement affirmer que l’Église est déjà présente sur terre comme une institution visible et que le Royaume de Dieu est toujours à élaborer sur terre: il ne sera définitivement constitué qu’au ciel. On pourrait donc les comprendre comme la remarque d’une tension eschatologique entre le « déjà là » et le « pas encore ». Et effectivement, le chrétien est dans une situation “militante”, au sens classique du terme.

Le danger d’une fausse opposition entre l’Église visible et l’Église invisible

Mais ces propos peuvent aussi poser soulever des difficultés. Le risque est de revenir à la fausse opposition que faisait Luther entre l’Église visible (celle des hommes, la Babylone romaine) et l’Église invisible (celle des saints, la Jérusalem nouvelle). Cette opposition fut reprise par le théologien Robert Bellarmin en figure inverse: l’Église est alors réduite à sa visibilité: « aussi palpable et visible que la République de Venise et le Royaume de France », avait écrit le théologien.
En ce sens, le cardinal ne travaille pas pour une administration terrestre mais pour Dieu. Ce qui n’est pas faux en soi, et même plutôt rassurant. Mais cela traduit une fausse compréhension du mystère de l’Église, celle-ci étant ramenée à n’être qu’une ONG ou à une institution humaine.

Rappel de l’ecclésiologie de Lumen Gentium

Il est évident que cette opposition est absurde si l’on comprend l’Église comme il se doit, suivant l’enseignement de la Constitution dogmatique Lumen Gentium:
– « Peuple de Dieu »: en pèlerinage sur cette terre et en marche vers la Patrie;
– « Corps du Christ » : à la fois mystique et incarné, sacrement de l’Union à Dieu et de l’unité des hommes;
– « Temple de l’Esprit » : l’Esprit saint étant l’âme de l’Église, présence dans un temple de pierres vivantes non fait de mains d’hommes.

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