En raison d’une série de meurtres ces dernières semaines (douze en un mois dont une élue locale), des voix s’élèvent au Sénégal pour réclamer le rétablissement de la peine de mort. La dernière exécution dans ce pays avait eu lieu en 1967 et la peine capitale avait été abolie le 10 décembre 2004.
Les ONG islamiques sénégalaises Jamra et Mbagn Gacce suggèrent au président de la République, Macky Sall, la tenue d’un référendum sur la restauration de la peine de mort en vue de pouvoir faire face à l’ « insécurité et (à la) criminalité galopante » dans le pays. « A la lumière de la forte indignation des populations, largement perceptible à travers les «talk-shows» des médias, il y a fort à craindre qu’elles se hâteront de saisir cette opportunité pour exprimer, démocratiquement, leur impatience à faire changer la peur de camp ! », écrivent les deux ONG dans un communiqué conjoint.
Mais, ces positions passent très mal aux yeux de l’Église sénégalaise qui se réfère naturellement aux écrits de la Bible, et à la doctrine sociale de l’Église, pour rappeler son opposition de principe. « Je voudrais rappeler que dans la Bible Dieu dit tu ne tueras pas ; ça s’adresse à tout le monde », a dit Mgr Benjamin Ndiaye, archevêque de Dakar, enseignant que « ce n’est pas en supprimant le meurtrier qu’on va faire revenir cette vie ».
Comme lui, les prêtres rencontrés sont sur la même logique. C’est le cas de l’aumônier de l’Université catholique de l’Afrique de l’ouest (Ucao) qui pense qu’il n’appartient pas aux hommes de mettre fin à la vie de quelqu’un. « Il faut mettre en avant la sacralité de la vie de la personne humaine. Elle ne nous appartient pas, a prêché le P.Marcel Ciss, qui estime que quelle que soit la douleur que le crime peut causer, nous devons nous référer aux dix commandements de Dieu dans lesquels on enseigne de ne point tuer ».
Selon lui, même s’il y a des fondamentalistes, nous devons mettre en avant notre foi, en référence à Jésus dans Mathieu 5, 38-39, enseignant ceci : «…Si quelqu’un te frappe sur la joue droite, présente-lui aussi l’autre… ». Toutefois, même si elle ne peut pas être pour la peine de mort, l’Église s’en remet à la loi du pays qui sera chargé de juger les présumés fautifs, a-t-il poursuivi. Abondant dans le même sens, le Vicaire de la paroisse Notre Dame des anges de Ouakam pense que la solution est ailleurs et non dans la peine de mort. « Il faut surtout prier pour la reconversion de ces gens qui ont tué, a proclamé l’Abbé Jules Pascal Coly. D’autant plus que « la personne humaine a toujours une marge possible de se redresser », a ajouté Abbé Nicolas Biagui, Vicaire général du Diocèse de Ziguinchor. Mieux, poursuit-il, « le Sénégal est un pays ouvert sur le monde et il ne peut pas remettre cette forme pour régler des situations de comportements humains sociaux ».
Dans cette même idée, le Vicaire de la paroisse Notre dame des anges, l’Abbé Roger Gomis, directeur de la communication de l’archidiocèse de Dakar pense que « nous devons mettre l’accent sur l’éducation pour construire un modèle de société ». Parce que les sociétés mettent trop l’accent sur le matériel, oubliant qu’une société c’est d’abord des femmes et des hommes. Pour cette raison, l’archevêque pense que « la société doit se donner les moyens pour éradiquer de son sein toute violence, parce que tuer dans tous les cas, c’est un geste de violence ».