Comme chaque 25 janvier, dans la basilique Saint-Paul-hors-les-Murs de Rome, le Pape a présidé les vêpres en la fête de la conversion de Saint-Paul, point d’orgue de la semaine de l’unité des chrétiens. Une cérémonie présidée en présence notamment des représentants du patriarcat de Constantinople et de l’archevêché de Canterbury, mais aussi, cette année, d’une délégation évangélique luthérienne que François avait reçu ce jeudi matin au Vatican.
Le Pape est revenu dans son homélie sur le récit tiré du livre de l’Exode où Moïse, avec le peuple de Dieu, chante sa louange après avoir été libéré de l’Egypte. Moïse lui-même avait déjà été précédemment sauvé des eaux après que Pharaon avait ordonné de jeter au Nil «tous les fils qui naitront aux Hébreux». Ce sauvetage de Moïse préfigure encore un sauvetage plus important, a rappelé le Pape, celui du peuple de Dieu qui a traversé à sec la Mer Rouge avant qu’elle ne se referme sur ses ennemis.
De nombreux pères antiques ont considéré ce passage comme une préfiguration du baptême a souligné François : ce sont en effet nos péchés qui sont noyés dans les eaux vives baptismales. Beaucoup plus que l’Egypte, le péché nous menaçait de nous rendre à jamais esclaves, mais la force de l’amour divin l’a renversé.
Saint Augustin, de son côté, a interprété la Mer Rouge, où le peuple d’Israël a été sauvé, comme une préfiguration du sang du Christ crucifié, source de salut.
La liberté retrouvée
Nous tous chrétiens, a expliqué le Pape, sommes passés par les eaux du Baptême, et la grâce du sacrement a détruit nos ennemis, le péché et la mort. Sortis des eaux, nous avons retrouvé la liberté des fils, nous avons émergé comme un peuple, comme une communauté de frères et sœurs sauvés, comme des concitoyens des saints, et membres de la famille de Dieu (Eph, 2-19).
Nous partageons l’expérience fondamentale a poursuivi François : la grâce de Dieu, sa miséricorde puissante qui nous sauve. Et c’est justement parce que Dieu a opéré cette victoire en nous que nous pouvons chanter ensemble ses louanges.
Dans la vie, nous expérimentons la tendresse de Dieu, qui chaque jour nous sauve avec amour du péché, de la peur et de l’angoisse, a encore souligné le Saint-Père, des expériences précieuses qui sont gardées dans le cœur et la mémoire.
L’histoire du salut
Comme pour Moïse, les expériences individuelles sont liées à une histoire qui nous dépasse, celle du salut de tout le peuple de Dieu. Quand les Hébreux élèvent leur chant vers Dieu, chacun se rend compte qu’il n’est pas seul sur les rives de la Mer Rouge, mais entouré de frères et de sœurs qui ont reçu la même grâce et proclament la même louange.
Le Pape a aussi rappelé que saint Paul avait lui aussi fait l’expérience de la grâce, qui de persécuteur des chrétiens, l’a fait devenir apôtre. Cette grâce de Dieu l’a poussé lui aussi à chercher la communion avec les autres chrétiens, d’abord à Damas, puis à Jérusalem.
Quand nous grandissons dans la vie spirituelle, nous comprenons toujours mieux que la grâce nous rejoint en même temps que les autres et qu’elle est à partager avec les autres. Les différentes confessions chrétiennes ont fait cette expériences, a précisé François. Au siècle dernier, nous avons finalement compris que nous étions ensemble sur les rives de la Mer Rouge.
Le baptême des autres chrétiens reconnus
Dans le baptême, nous avons été sauvés, et le chant reconnaissant de la louange, que les autres frères et sœurs entonnent, nous appartient, parce qu’il est aussi le nôtre.
Lorsque nous disons reconnaître le baptême des chrétiens des autres traditions, nous confessons qu’eux aussi ont reçu le pardon du Seigneur et sa grâce qui œuvre en eux a dit le Pape, et nous accueillons leur culte comme une expression authentique de louange pour tout ce que Dieu fait. Nous désirons alors prier ensemble, en unissant encore plus nos voix. Et même quand les divergences nous séparent, a-t-il poursuivi, nous reconnaissons appartenir au peuple de des croyants, à la même famille de frères et sœurs aimés de l’unique Père.
Déserts spirituels et persécutions
Après la libération, le Peuple de Dieu a entrepris un long et difficile voyage à travers le désert, souvent en vacillant, mais en puisant la force dans le souvenir de l’œuvre salvifique de Dieu et de sa présence toujours proche.
Les chrétiens d’aujourd’hui rencontrent aussi sur le chemin de nombreuses difficultés a noté le Souverain Pontife, entourés de tant de déserts spirituels, qui font se tarir l’espérance et la joie.
Sur le chemin a poursuivi le pape, existent aussi de graves périls, qui mettent la vie en danger : combien de frères subissent aujourd’hui les persécutions au nom de Jésus ! Quand leur sang est versé, même appartenant à des confessions diverses, ils deviennent ensemble des témoins de la foi, des martyrs, unis dans le lien de la grâce baptismale.
Les chrétiens, aux côtés d’amis d’autres traditions religieuses affrontent également des défis qui avilissent la dignité humaine : ils fuient des situations de conflit ou de misère, sont victimes de la traite d’êtres humains et d’autres esclavages modernes, ils ont faim dans un monde toujours plus riche de moyens et pauvre d’amour, où augmentent toujours plus les inégalités.
Mais comme les Hébreux de l’Exode a précisé le Pape, les chrétiens sont appelés à garder ensemble le souvenir de ce que Dieu a réalisé pour eux.