Rédemption de Charles Gounod, une oeuvre aussi rare qu’unique

Rédemption de Charles Gounod, une oeuvre aussi rare qu’unique

Il est des œuvres superbes et rares oubliées, délaissées et qui pourtant méritent le détour. C’est le cas de Rédemption de Charles Gounod. Ecrit en 1882, dédié à Sa Très Gracieuse Majestée la Reine Victoria, Rédemption est un véritable panégyrique de la foi chrétienne. Plus encore, « Cet ouvrage, nous dit l’auteur dans l’introduction explicative qu’il laisse, est l’exposé lyrique des trois grands faits marquants sur lesquels repose l’existence de la Société Chrétienne. »

Gounod, auteur engagé quoique discret, de la fin du XIXème siècle, prend sa part dans la tentative de certains artistes pour, par l’art, lutter contre les œuvres de sape de la société anti chrétienne qui se développent. Cette œuvre est une véritable catéchèse.

Un prologue l’introduit. Gounod pose ainsi l’enjeu du drame qui constituera la masse centrale de l’œuvre. Au début était le néant informe (timbales, cordes) et l’esprit planait sur les eaux (flûtes clarinettes et hautbois). Puis Dieu crée le monde, puis l’homme et ce fut la chute à cause du démon. Les sacrifices sont impuissants à restaurer la relation perdue, il faut un rédempteur (apparaît alors pour la première fois au violon solo le thème de l’Homme Dieu Rédempteur). Puis avec le chœur céleste arrive la promesse de la rédemption, après la reprise du thème du Rédempteur, par l’ensemble du quatuor, tandis que les flûtes modulent ce thème pour évoquer la salutation angélique et l’incarnation dont le FIAT est à son tour modulé par les clarinettes.

Le décor est planté, l’enjeu est clair, l’œuvre elle-même commence. La première partie de cette trilogie est la plus longue. Elle fait la moitié de l’œuvre. La passion et la mort du Sauveur, après un court récitatif sur l’arrestation et la condamnation, les insultes et surtout une longue marche au calvaire. La marche instrumentale nous dit Gounod « c’est la brutalité de la force matérielle et païenne conduisant Jésus au supplice, tandis qu’une lamentation confiée aux voix de femmes représentent la compassion chrétienne ». La mélodie de cette lamentation n’est autre que le Vexila Regis de la liturgie catholique. Puis « reprise de la marche instrumentale, mais combinée avec la mélopée entière de la lamentation et signifiant par cette persistance continue des deux thèmes réunis la double persistance de la persécution et de la compassion à travers les siècles ».

Le Christ est crucifié par les clous que plante l’orchestre. Marie est là, au pied de la Croix Sainte, à la foi sereine et forte mais aussi transpercée comme les dissonances du chœur le soulignent. Jésus meurt seul au milieu de l’orchestre ténébreux et c’est le centurion qui clôt cette première partie en confessant la divinité du Christ, tandis que le chœur campe l’Eglise (comme le souligne l’usage d’un choral) qui apostrophe la mort vaincue. Les rythmes de cette apostrophes sont les mêmes que ceux utilisés par la foule pour réclamer la mort de Jésus, les mêmes que ceux du peuple haineux triomphant au pied de la croix. Ainsi, dans la paix de l’adoration se conclut la première partie.

La seconde partie s’ouvre par le chœur mystique proclamant le dogme de la résurrection, au son « des trompettes dans les hauteurs ». Puis les femmes se rendent au Sépulcre, tandis que le Sanhédrin soudoient les gardes du tombeau vide. C’est le temps de la vie glorieuse du Christ sur la terre, le second événement sur lequel repose la société chrétienne. Mais Gounod ne s’arrête pas là. Le Christ monté à la droite du Père aurait pu conclure cet oratorio magistral. Mais non, car ce n’est pas une fin en soi.

Il reste encore le troisième événement fondateur, la diffusion du christianisme à travers la mission apostolique, « âge béni ». Après l’épisode fondateur du cénacle, arrive, comme un appel actuel, l’hymne apostolique. « Ce morceau, nous dit l’auteur, le dernier et l’un des plus développé de la trilogie, comprend sept périodes et résume la foi chrétienne. Le collège apostolique proclame d’abord les trois grands dogmes de l’Incarnation du Verbe, de Sa Génération éternelle et de la Présence réelle dans la Consécration Eucharistique. Puis le quatuor proclame que Jésus est la foi qui sauve et la paix qui console. Le chœur manifeste la puissance de Dieu par les miracles, tandis que le quatuor reprend « venez à moi vous tous qui pleurez ». Un petit chœur entonne les béatitudes et la coda finale glorifie « la Très Sainte Trinité dans les siècles des siècles. »

Source Cyrano.net

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