La situation de l’Ordre de Malte semble s’apaiser avec le départ du Grand-Maître Fra’ Matthew Festing. Pourtant, les termes avec lesquels ce départ a été officialisé laissent planer de nombreuses ombres.
Le rôle du Saint-Siège n’est pas clair et les déclarations provenant du Saint-Père lui-même utilisent un vocabulaire juridique abusif. La communication provenant tant de l’Ordre que du Vatican est elle-même floue et contradictoire. La relecture du fil des événements laisse un grand malaise, comme nous l’avions souligné la semaine dernière.
Le pape s’exprime comme le grand ordonnateur des décisions concernant la crise et semble, invalider de son propre chef les décisions de Fra’ Matthew depuis le 6 décembre 2016. Si tel est bien le cas, il s’agit d’un véritable coup d’Etat et d’une ingérence sans précédant. Le pape n’a pas cette autorité sur l’Ordre.
On sait cependant, selon d’autres versions “officielles”, que l’ancien Grand-Maître passait pour autoritaire, ayant monté un conseil parallèle, véritable gouvernement de l’Ordre. En ce cas s’agit-il d’une révolution de palais avec le soutien (juridiquement abusif mais visiblement accepté) d’un pape soucieux de sortir de la crise en prenant sur son autorité morale ? Mais alors, si le gouvernement était dictatorial depuis son origine, pourquoi n’invalider que les décisions datant du 6 décembre et permettant justement la réintégration immédiate du Grand Chancelier ?
Nous assistons à un coup de théâtre politique dont on ne sait s’il faut parler de coup d’Etat ou de révolution de palais. Le trouble s’accroît avec la nomination d’un délégué spécial du pape, alors qu’il existe bel et bien une personne prévue par l’Ordre pour représenter le pape. Or à aucun moment il n’est fait mention du cardinal légat qui se trouve de facto dépouillé de ses prérogatives. Pourtant, l’enquête semble avoir lavé de tout soupçon le cardinal Burke.
Que cache de si complexe et trouble cette situation d’autant plus ubuesque que le Conseil Souverain a tenu à remercier chaleureusement Fra’ Matthew ? Rhétorique de circonstances ? Volonté d’apaisement ? Cette crise était elle la victoire d’une vision de l’Ordre sur une autre, cristallisée autour de la distribution de préservatifs ? L’ingérence du pape est-elle aussi de circonstance ? Est-elle subie par l’Ordre réduit à l’impuissance par quelques affaires obscures ? Le Saint-Père lui-même, pointé du doigt par une partie du personnel du Vatican pour son autoritarisme, est-il allé trop loin de sa propre initiative ?
Le ciel s’assombrirait-il au dessus du Saint-Siège ? Se dégage-t-il sur Malte ?