Certes il faut « accueillir, protéger, promouvoir, intégrer » les réfugiés, mais compte tenu de la « vertu » de l’art de gouverner qui est la « prudence », rappelle le pape François. Il distingue entre la gestion habituelle des migrations et les interventions urgentes. Et il apporte son soutien aux évêques américains.
Le pape François a résumé ainsi ses messages sur la dignité des réfugiés, le 21 juin 2018, en réponse à une question, en italien, de la journaliste espagnole Eva Fernández. Au lendemain de la Journée mondiale des réfugiés.
Dans l’avion, le pape a aussi parlé de ses « rencontres » à Genève, de l’inter-communion en Allemagne, et il a affirmé l’urgence de l’union des chrétiens pour la paix dans le monde et le refus du prosélytisme.
Voici la traduction de Zenit de la réponse faite par le pape François en italien :
« J’ai beaucoup parlé des réfugiés et les critères sont dans ce que j’ai dit: «accueillir, protéger, promouvoir, intégrer». Ce sont des critères pour tous les réfugiés. Puis j’ai dit que chaque pays doit faire cela avec la vertu du gouvernement qui est la prudence, car un pays doit accueillir autant de réfugiés que possible et autant qu’il peut les intégrer: intégrer, c’est-à-dire éduquer, donner du travail … Voilà, disons, le plan tranquille, serein, des réfugiés.
Ici, nous vivons une vague de réfugiés fuyant les guerres et la faim. Guerre et faim dans de nombreux pays d’Afrique, guerres et persécutions au Moyen-Orient. L’Italie et la Grèce ont été très généreuses dans l’accueil. Pour le Moyen-Orient – en ce qui concerne la Syrie – la Turquie en a reçu tant; Liban, tant: le Liban a autant de Syriens que de Libanais; puis la Jordanie et d’autres pays. Même l’Espagne en avait accueillis.
Il y a le problème du trafic des migrants. Et il y a aussi le problème des cas où ils repartent, parce qu’ils doivent repartir: il y a ce cas … Je ne connais pas bien les termes de l’accord, mais si ils sont dans les eaux libyennes, il doivent repartir … Et j’ai vu les photos des prisons de trafiquants. Les trafiquants séparent immédiatement les femmes des hommes: les femmes et les enfants vont Dieu sait où … C’est ce que font les trafiquants. Il y a aussi un cas, je le sais, où les trafiquants se sont approchés d’un navire qui avait recueilli des réfugiés des bateaux et ils ont dit: «Donnez-nous les femmes et les enfants et emmenez les hommes». Voilà ce que font les trafiquants.
Et les prisons des trafiquants, pour ceux qui sont retournés, sont terribles, elles sont terribles. Dans les camps de la Seconde Guerre mondiale on voyait cela. Même des mutilations, des tortures … Et puis ils les jettent dans les fosses communes, les hommes.
Voilà pourquoi les gouvernements se préoccupent de ne pas les faire repartir, pour qu’ils ne tombent pas entre les mains de ces gens-là. La préoccupation est mondiale. Je sais que les gouvernements en parlent et qu’ils veulent trouver un accord, même pour amender l’Accord de Dublin.
En Espagne, vous avez eu le cas de ce navire qui est arrivé à Valence. Mais tout ce phénomène est un désordre. Le problème des guerres est difficile à résoudre; le problème de la persécution des chrétiens aussi, au Moyen-Orient et aussi au Nigeria.
Mais le problème de la faim peut être résolu. Et beaucoup de gouvernements européens pensent à un plan d’urgence pour investir dans ces pays, investir intelligemment, donner du travail et une éducation, ces deux choses. Dans les pays d’où viennent ces personnes. Parce que – sans offenser, mais c’est la vérité – dans l’inconscient collectif, il y a une horrible devise: «L’Afrique doit être exploitée» – Africa es para ser explotada. C’est dans l’inconscient: « Eh, ce sont des Africains! … ». Terre d’esclaves. Et cela doit changer avec ce plan d’investissements, d’éducation, de développement, parce que le peuple africain a tant de richesses culturelles, tant ! Et ils ont une grande intelligence: les enfants sont très intelligents et ils peuvent, avec une bonne éducation, aller plus loin. Ce sera la route à moyen terme.
Mais sur le moment, les gouvernements doivent se mettre d’accord pour avancer avec cette urgence. Ceci, ici, en Europe.
Allons en Amérique. En Amérique, il y a un gros problème migratoire en Amérique latine, et il y a aussi le problème de la migration interne. Dans ma patrie, il y a un problème de migration du nord au sud; les gens quittent la campagne parce qu’il n’y a pas de travail et ils vont dans les grandes villes, et il y a ces mégapoles, ces bidonvilles, et toutes ces choses … Mais il y a aussi une migration externe vers d’autres pays qui donnent du travail. Pour parler concrètement, vers les États-Unis. Je suis d’accord avec ce que disent les évêques de ce pays. Je les soutiens. Merci. »