McCarrick et la Papal Foundation : une piste à suivre ?

de Guillaume Luyt pour Infovaticana.fr :

Le terrible témoignage de Mgr Viganò a désormais fait le tour du monde. Non seulement les grands médias internationaux mais aussi les médias catholiques progressistes, comme The Tablet, en font écho. Aucun ne met en cause la crédibilité des accusations portées par Mgr Viganò.

En revanche, usant d’une technique de communication éculée, beaucoup – comme le NY Times dans un article signé Jason Horowitz (ici) – s’attardent sur la personnalité de Mgr Viganò et ses amitiés « traditionalistes » ainsi que sur les médias « conservateurs » ayant publié sa lettre pour mieux ignorer, si ce n’est discréditer, la substance de ses révélations. Les mêmes médias qui réclament depuis des années la transparence la plus totale en matière de scandales sexuels dans l’Église réussissent ainsi à ne même pas s’interroger sur les protections dont le cardinal McCarrick a évidemment bénéficié au cours de sa longue carrière de prédateur.

Le Saint-Père a pour l’instant choisi de ne pas commenter la note de Mgr Viganò, déclarant lors de la conférence de presse dans l’avion de retour d’Irlande, hier soir : « J’ai lu la déclaration ce matin et je dois vous dire, à vous et à tous ceux qui sont intéressés : lisez attentivement la déclaration et faites-vous votre propre jugement. Je ne dirai pas un mot à ce propos. La déclaration parle pour elle-même. Vous avez la compétence journalistique pour en tirer vos propres conclusions. C’est un acte de foi. Quand un peu de temps sera passé et que vous aurez tiré vos conclusions, je parlerai éventuellement. » (source CNA)

Pour notre part, nous souhaitons aujourd’hui soulever une seule question relative à l’impunité et aux promotions dont McCarrick a bénéficié sous le pontificat de Jean-Paul II, et à son retour en grâces sous François :
– se peut-il que, à l’instar du P. Maciel, le cardinal McCarrick ait pu être protégé par les millions qu’il adressait chaque année au Saint-Siège par le biais de la Papal Foundation dont il a été, aux côtés des cardinaux Krol et O’Connor l’un des fondateurs, et dont il était encore membre du conseil d’administration jusqu’à sa démission en juin dernier ?

McCarrick protégé par les millions levés par la Papal Foundation ?

« La nomination à Washington et au cardinalat de McCarrick a-t-elle été le fait de Sodano, alors que Jean-Paul II était déjà bien malade ? Je ne le sais pas mais il semble légitime de le penser. Je ne crois pas toutefois qu’il soit le seul responsable : McCarrick se rendait fréquemment à Rome et se faisait des amis partout, à tous les niveaux de la curie. Si Sodano a protégé Maciel, comme cela semble établi, on ne voit pas pourquoi il n’aurait pas protégé McCarrick qui, selon beaucoup, avait les moyens financiers d’influencer bien des décisions. »

Cette réflexion de Mgr Viganò, en page 4 de son témoignage, doit être complété par les informations livrées par Michelle Boorstein, reporter au Washington Post, dans un article publié le 31 juillet 2018et intitulé « Alors que les rumeurs de méfaits sexuels couraient, le cardinal McCarrick devenait un puissant leveur de fonds pour le Vatican ».
Dans ce long papier, Boorstein rappelle que McCarrick, alors qu’il était archevêque de Newark, a participé à la création de la Papal Foundation en 1988. Le principe de cette fondation est simple : recruter des donateurs s’engageant à verser au minimum 1 million de dollars sur 10 ans (100 000 dollars par an) au profit des œuvres du Saint-Père. Sur son site, la fondation indique avoir déjà levé plus de 215 millions de dollars depuis sa création. Créée pour réveiller la générosité des bienfaiteurs catholiques américains, profondément ébranlée par l’affaire Marcinkus et le scandale de la banque Ambrosiano, la Papal Foundation est devenue l’une des principales sources de financement à disposition directe du Saint-Siège. Et le zèle de McCarrick n’y est pas pour rien : « La Papal Foundation était un formidable instrument pour lui pour se rendre à Rome », explique Steve Schneck à Boorstein. En tant que responsable de l’Institute for Policy Research and Catholic Studies à l’Université catholique d’Amérique de Washington. Schneck a souvent collaboré avec McCarrick : « Il n’y a pas une seule organisation catholique des États-Unis pour laquelle il n’ait pas levé de fonds. »

Comme le rappelait hier l’épître du XIVème dimanche après la Pentecôte dans le missel de 1962 : « les œuvres de la chair sont manifestes : c’est la fornication, l’impureté, l’impudicité, la luxure, l’idolâtrie, les maléfices, les inimitiés, les querelles, les jalousies, les animosités, les rixes, les dissensions, les factions, l’envie, les meurtres, l’ivrognerie, les débauches, et les choses semblables ». Rien de nouveau, donc, sous le soleil de Satan…


« La popularité de McCarrick et son imposant statut d’émissaire de l’Église et de prolifique leveur de fonds pour les œuvres catholiques ont peut-être contribué à le protéger au fil des années alors que d’autres chuchotaient des mots qui s’ajoutaient à sa réputation : harceleur, tripoteur, infidèle à ses vœux de célibat. »
Michelle Boorstein, Washington Post

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