Hier 19 février, à 14 h, sur la très belles place San Silvestro, dans le centre historique de Rome, des « Silencieux » manifestaient, en prévision de la réunion des présidents des Conférences épiscopales du monde.
Ils étaient cent, venant du monde entier. Ils se sont soigneusement disposés en rectangle, et debout, en silence, récitant le chapelet ou écoutant des textes spirituels, ils ont attendu. Le nom qu’ils ont donné à leur manifestation : sicut acies ordinata, comme une armée rangée en ordre de bataille, ces paroles du Cantique des Cantiques, 6, 9, qu’on applique à la Sainte Vierge.
« Nous participons à cet événement à titre personnel ou au nom d’associations et de journaux unis par l’amour de l’Église, de sa doctrine et de ses institutions », déclaraient les organisateurs. « Fils de l’Église militante, nous sommes ici pour professer publiquement notre foi catholique, mais aussi pour briser le mur du silence. L’église de San Silvestro in Capite, sur cette place, contient la relique de la tête de saint Jean-Baptiste. Le précurseur du Messie a été réduit au silence par Hérode, mais son langage silencieux continue de parler à nos cœurs. Nous nous tenons, de manière respectueuse et ordonnée, pour exprimer symboliquement la résistance de ceux qui ne se plient pas devant le silence. […] Le sommet des présidents des conférences épiscopales, qui s’ouvre le 21 février en présence du Saint-Père, est une occasion historique de traiter non seulement le problème des abus sexuels sur mineurs, mais également le thème de la corruption morale, qui inclut toute violation de la loi divine et naturelle, à commencer par le terrible fléau de l’homosexualité. L’Église ne craint pas la vérité, car elle proclame au monde la vérité de sa tête et de son fondateur, Jésus-Christ. C’est surtout vers lui que nous nous tournons avec cet acte symbolique pour que, en ces temps calamiteux, il vienne au secours de notre faiblesse et avec un seul mot, qu’il sauve son Église ».
Puis une conférence de presse s’est tenue à 15 h 15 à la salle de la Presse étrangère, via dell’Umiltà. Rome n’est pas la France : de très nombreux journalistes interrogeaient les intervenants (dont le professeur Roberto De Mattei, de la Fondation Lépante). Nous reproduisons l’intervention de Jean-Pierre Maugendre, de Renaissance Catholique, qui a répondu à la question : « Un des organisateurs de cette rencontre [des présidents de Conférences épiscopales], le cardinal Blase Cupich, archevêque de Chicago, a déclaré, dans un entretien avec The Tablet, que la fin de ce sommet marquerait le début d’une réforme générale de l’Église. Qu’en pensez-vous ? ».
J.-P. M. : Que l’Église ait besoin d’une réforme, personne n’en disconvient. Encore faut-il savoir quels sont les principes qui présideraient à cette réforme. En effet, inéluctablement, les principes déploient leurs conséquences logiques. Or il ne semble pas que les organisateurs du prochain Synode [la réunion des présidents des conférences épiscopales] aient l’intention de revenir sur les principes qui ont mené la sainte Église de Dieu à la situation tragique qu’elle vit aujourd’hui.
Il est à craindre que ne soit toujours d’actualité la réflexion pleine de bon sens de Jacques-Bénigne Bossuet, alors évêque de Meaux, à la fin du XVIIe siècle : « Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes ». Quelles sont donc les causes des effets que nous déplorons ?
Alors que 80 % des actes de pédophilie récemment dénoncés sont de nature homosexuelle, un silence assourdissant accompagne l’observation de cette réalité. Or seule la vérité libère (Jn VIII, 32). Cette vérité est que « Les actes d’homosexualité sont intrinsèquement désordonnés. Ils sont contraires à la loi naturelle. Ils ne sauraient recevoir d’approbation en aucun cas. » (CEC §2357). Il y a cinquante ans, dans un ouvrage récemment réédité, Jean Madiran avait dénoncé l’Hérésie du XXe siècle qui était, d’abord selon lui, celle des évêques qui avaient renoncé à enseigner la loi naturelle, qui est l’autre nom de la loi de Dieu.
À celui qui vient lui demander : « Que dois-je faire pour entrer dans la vie éternelle ? » le Seigneur répond d’abord : « Si tu veux entrer dans la vie éternelle observe les commandements » et Il lui rappelle les commandements du Décalogue (cf. Matt XIX, 16-19). Or comme l’affirme la sagesse populaire : « Qui ne dit mot, consent. » L’Église semble s’être ralliée, par un silence complice, à une banalisation de l’homosexualité.
Il n’y a là rien de nouveau. Depuis deux mille ans, l’Église est confrontée à la tentation de se conformer à l’esprit du Monde nonobstant l’admonestation de saint Paul : Nolite conformari huic saeculo (« Ne vous modelez-pas sur ce monde-ci », Rom XII, 2). L’esprit de conciliation avec le monde a vidé les dogmes de leur substance, ravagé la liturgie, réduit la morale à un vague sentimentalisme, annihilé tout esprit missionnaire, enfin réduit l’Église à ne plus aspirer à être qu’un vague Mouvement d’Animation Spirituelle de la Démocratie Universelle (MASDU).
Toute prétendue réforme de l’Église serait vouée à l’échec si elle n’était pas d’abord une réforme non seulement théocentrée mais plus essentiellement Christo centrée. À cet égard, le rétablissement du sacerdoce catholique dans sa réalité sacrificielle et oblative est l’urgence de l’heure. Simples laïcs du bout du banc, nous sommes les témoins atterrés et meurtris de la désacralisation du sacerdoce catholique. Au jeune garçon à qui il demandait son chemin, le curé d’Ars lui promit de lui montrer le chemin du Ciel. C’est la seule réforme de l’Église à laquelle nous aspirions : celle qui, enfin, indiquera clairement les chemins du Ciel et donnera au peuple chrétien les moyens de surmonter ce chemin semé d’embûches.
Source : Riposte Catholique