Tribune du Comité Pro Persona dans Le Monde du 6 décembre 2018 :
La financiarisation de l’entreprise, qui assigne comme seul objectif à sa gestion la maximisation du résultat pour l’actionnaire, est à l’origine d’une perte globale de sens du travail, rappelle le Comité Pro Persona dans une tribune au « Monde ». La loi Pacte permettra de remettre l’humain au cœur du projet entrepreneurial.
Début octobre, le projet de loi Pacte (projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises), qui comprend un volet relatif à l’objet social de l’entreprise, a été approuvé en première lecture à l’Assemblée nationale, avant son passage au Sénat en janvier 2019.
Ce thème, venu au grand jour il y a quelques mois à l’occasion de la publication du rapport Notat-Sénard (« L’entreprise, objet d’intérêt collectif », voir lien PDF), dépasse largement le seul débat législatif. Il s’enracine dans une réflexion de fond, qui pose la question de la finalité de l’entreprise, et qui y répond autrement que par des considérations seulement financières.
Dans un pays comme la France, toute modification du code civil est un événement. Le projet de loi Pacte, qui comprend, parmi ses cent quarante articles, la modification des articles 1833 et 1835 du code civil portant sur l’objet social de l’entreprise et sur ses statuts, n’échappera pas à la règle. Mais pour que cet événement fasse vraiment date, deux écueils doivent à notre sens être évités.
Le premier écueil est celui de la judiciarisation. De quoi s’agit-il ? En ajoutant un alinéa à l’article 1833, qui prévoit dorénavant que la gestion d’une entreprise se fait en prenant en considération « les enjeux sociaux et environnementaux de son activité », le risque existe de transformer la responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) en arme juridique qui pourra être brandie contre tous les dirigeants d’entreprise qui seront accusés de ne pas en faire assez sur ce terrain. Comment déterminer qui en fait assez ?