Alors qu’un sondage vient de confirmer, sans appel, la volonté des parents de rester maîtres de l’éducation de leurs enfants, nous redonnons ici quelques éléments de l’enseignement des papes sur l’éducation.
(reprise estivale d’un article du 20 novembre 2016)
« Comme l’éducation véritable doit avoir pour but la formation intégrale de la personne humaine ayant en vue sa fin dernière en même temps que le bien commun de la société, les enfants et les jeunes seront formés de telle façon qu’ils puissent développer harmonieusement leurs dons physiques, moraux et intellectuels, qu’ils acquièrent un sens plus parfait de la responsabilité et un juste usage de la liberté, et qu’ils deviennent capables de participer activement à la vie sociale ».
Code de droit canonique (1983), can.795.
Il y a trois sociétés nécessaires établies par Dieu, à la fois distinctes et harmonieusement unies entre elles, au sein desquelles l’homme vient au monde. Deux sont d’ordre naturel : la famille et la société civile ; la troisième, l’Eglise, est d’ordre surnaturel.
La famille
« En premier lieu, la famille, instituée immédiatement par Dieu, pour sa fin propre, qui est la procréation et l’éducation des enfants. Elle a pour cette raison une priorité de nature et par suite une priorité de droits, par rapport à la société civile…Ce droit de donner l’éducation à l’enfant est inaliénable parce qu’inséparablement uni au strict devoir corrélatif…(il est) inviolable par quelque puissance terrestre que ce soit…
L’Eglise
Société d’ordre surnaturel et universel, société parfaite, car elle a en elle tous les moyens requis pour sa fin qui est le salut éternel des hommes (…) elle a la suprématie dans son ordre…(L’éducation lui)appartient d’une manière suréminente à deux titres d’ordre surnaturel…Le premier se trouve dans la mission expresse et l’autorité suprême du magistère que son divin fondateur lui a données : Allez, enseignez toutes les nations (…). Le second est la maternité surnaturelle par laquelle l’Eglise, épouse immaculée du Christ, engendre, nourrit et élève les âmes dans la vie divine de la grâce par ses sacrements et son enseignement…
La société civile, l’Etat
La famille est une société imparfaite parce qu’elle n’a pas, en elle-même, tous les moyens nécessaires pour atteindre sa perfection propre ; tandis que la société civile est une société parfaite car elle a les moyens nécessaires à sa fin propre qui est le bien commun temporel. Elle a donc sous cet aspect, c’est-à-dire par rapport au bien commun, la prééminence sur la famille, qui trouve précisément dans la société civile la perfection temporelle qui lui convient…
Les droits de la société civile lui sont communiqués par l’auteur même de la nature, non pas à titre de paternité, comme à l’Eglise et la famille, mais en vertu de l’autorité sans laquelle elle ne peut promouvoir ce bien commun temporel qui est sa finalité propre. En conséquence, l’éducation ne peut appartenir à la société civile de la même manière qu’à l’Eglise et à la famille, mais elle lui appartient dans un mode différent en rapport avec sa fin propre… »
Pie XI, Divini Illius Magistri, 1929, n°3,4,9,14.
Droits de l’Eglise
« En ce qui concerne l’objet propre de sa mission éducatrice, c’est-à-dire la foi et la règle des mœurs (…) l’Eglise est la maîtresse suprême et très sûre des hommes et a reçu un droit inviolable au libre exercice de son magistère. La conséquence nécessaire en est l’indépendance de l’Eglise vis à vis de tout pouvoir terrestre, aussi bien dans l’origine que dans l’exercice de sa mission éducatrice, et non seulement en ce qui concerne l’objet propre de cette mission , mais aussi dans le choix des moyens nécessaires ou convenables pour la remplir. De là, à l’égard de toute autre science humaine et de tout enseignement qui, considérés en eux-mêmes, sont le patrimoine de tous, individus et sociétés, l’Eglise a le droit indépendant d’en user et surtout d’en juger, dans la mesure où ils peuvent se montrer utiles ou contraires à l’éducation chrétienne ».
Divini Illius Magistri, n°4.
« Le Concile proclame à nouveau le droit, pour l’Eglise, de fonder et de diriger librement des écoles de tous ordres et de tous degrés, droit déjà déclaré dans d’innombrables documents du magistère. Il rappelle que l’exercice de ce droit importe au premier chef à la liberté de conscience, à la garantie des droits des parents, ainsi qu’au progrès de la culture elle même ».
Gravissimum educationis momentum, n°8.
« La famille est incapable par elle-même de pourvoir à l’instruction des arts et des sciences qui font la richesse et la prospérité de la société civile. De là est sortie l’institution sociale de l’école. Mais qu’on le remarque bien, ceci se fit d’abord par l’initiative de la famille et de l’Eglise avant l’intervention de l’Etat. A ne considérer que ses origines historiques, l’école est de sa nature une institution auxiliaire et complémentaire de la famille et de l’Eglise ; partant, en vertu d’une nécessité logique et morale, l’école doit non seulement ne pas se mettre en contradiction mais s’harmoniser positivement avec les deux autres milieux, dans l’unité morale la plus parfaite possible (…). Faute de quoi, elle manquera sa fin pour se transformer en oeuvre de destruction ».
Divini Illius Magistri, n°31.
« La société civile a, entre autres tâches, à promouvoir de multiples manières l’éducation de la jeunesse. Elle garantit les devoirs et les droits des parents et autres personnes qui jouent un rôle dans l’éducation ; elle leur fournit son aide dans ce but. Selon le principe de subsidiarité, en cas de défaillances des parents ou à défaut d’initiatives d’autres groupements, c’est à la société civile, compte tenu cependant des désirs des parents d’assurer l’éducation. En outre, dans la mesure où le bien commun le demande, elle fonde ses écoles et institutions propres ».
Gravissimum educationis momentum n°3. Déclaration de Vatican II sur l’éducation chrétienne, 28 octobre 1965
« Entre tous les moyens d’éducation, l’école revêt une importance particulière ; elle est spécialement, en vertu de sa mission, le lieu de développement assidu des facultés intellectuelles ; en même temps, elle exerce le jugement, elle introduit au patrimoine culturel hérité des générations antérieures, elle promeut le sens des valeurs, elle prépare à la vie professionnelle ; entre les élèves d’origines sociales et de caractères différents, elle fait naître un esprit de camaraderie qui forme à la compréhension mutuelle. De plus, elle constitue comme un centre où se rencontrent pour partager les responsabilités de son fonctionnement et de son progrès familles, maîtres, groupements de tous genres créés pour le développement de la vie culturelle, civique et religieuse, la société civile et enfin toute la communauté humaine ».
Gravissimum educationis momentum, n°5.
« Puisqu’on a maintenant la possibilité de délivrer la plupart des hommes du fléau de l’ignorance, il est un devoir qui convient au plus haut point à notre temps… celui de travailler avec acharnement… à faire reconnaître, partout et pour tous, en harmonie avec la dignité de la personne humaine,… le droit à la culture et d’assurer sa réalisation. Il faut donc procurer à chacun une quantité suffisante de biens culturels, surtout de ceux qui constituent la culture dite de base, pour qu’un très grand nombre ne soit pas empêché, par l’analphabétisme et le manque d’initiatives, de coopérer de manière vraiment humaine au bien commun. En conséquence, il faut tendre à donner à ceux qui en sont capables la possibilité de poursuivre des études supérieures ; et de telle façon que, dans la mesure du possible, (…) ils rendent des services dans la vie sociale, qui correspondent soit à leurs aptitudes, soit à la compétence qu’ils auront acquise ».
Gaudium et Spes, 1965, n°60.
« Dans la mesure où l’école communique un savoir, un ensemble de connaissances ordonnées à l’activité extérieure des individus et surtout à l’exercice de leur profession, elle dépend aussi de la communauté, de ses traditions, de ses besoins, de son niveau de culture, de l’orientation de ses tendances. Les exigences de la communauté seront interprétées, au niveau de l’école, par des individus, des groupes organisés, des institutions culturelles ou religieuses, qui se proposent précisément comme fin propre, la formation des jeunes gens à leurs tâches futures ».
Divini Illius Magistri, rappelé par Pie XII aux Semaines Sociales de France, 28 juin 1958.
« Un regard sur l’avenir économique du pays conduit à un élargissement des perspectives. Car dans la mesure où l’on peut prévoir cet avenir et ses orientations majeures, il importe d’y préparer avec soin la jeunesse. Certes, il faut ici se garder des outrances de la technicité, éviter toute spécialisation prématurée et maintenir les droits de la culture ; celle-ci, outre sa valeur permanente, n’est-elle pas d’ailleurs, dans une période incertaine et mouvante comme la nôtre, le capital le plus sûr d’un peuple, qui lui donnera en temps utile les plus larges possibilités face aux situations nouvelles ? Néanmoins, il est normal d’envisager des relations régulières entre les responsables de l’enseignement et les divers secteurs de la vie industrielle, agricole ou commerciale… Dans ces milieux, l’art d’instruire a fait de réels progrès…On peut estimer que les échanges seraient fructueux tant pour le perfectionnement des méthodes pédagogiques que pour l’amélioration des programmes et l’ouverture progressive des élèves aux grands problèmes de la vie économique ».
Pie XII, lettre à la 45ième Semaine Sociale de France,28 juin 1958.
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36. Le devoir d’éducation a ses racines dans la vocation primordiale des époux à participer à l’œuvre créatrice de Dieu : en engendrant dans l’amour et par l’amour une nouvelle personne possédant en soi la vocation à la croissance et au développement, les parents assument par là même le devoir de l’aider efficacement à vivre une vie pleinement humaine. Comme l’a rappelé le Concile Vatican II : « Les parents, parce qu’ils ont donné la vie à leurs enfants, ont la très grave obligation de les élever et, à ce titre, doivent être reconnus comme leurs premiers et principaux éducateurs. Le rôle éducatif des parents est d’une telle importance que, en cas de défaillance de leur part, il peut difficilement être suppléé. C’est aux parents, en effet, de créer une atmosphère familiale, animée par l’amour et le respect envers Dieu et les hommes, telle qu’elle favorise l’éducation totale, personnelle et sociale, de leurs enfants. La famille est donc la première école des vertus sociales dont aucune société ne peut se passer » (99). Le droit et le devoir d’éducation sont pour les parents quelque chose d’essentiel, de par leur lien avec la transmission de la vie ; quelque chose d’original et de primordial, par rapport au devoir éducatif des autres, en raison du caractère unique du rapport d’amour existant entre parents et enfants ; quelque chose d’irremplaçable et d’inaliénable, qui ne peut donc être totalement délégué à d’autres ni usurpé par d’autres. Outre ces caractéristiques, on ne peut oublier que l’élément le plus radical, de nature à qualifier le devoir éducatif des parents, est En novembre 1981, le Pape Jean-Paul II a publié Familiaris consortio, l’exhortation apostolique post-synodale sur les tâches de la famille chrétienne dans le monde d’aujourd’hui. Il souligne dans ce document l’importance capitale du rôle des parents dans le processus de l’éducation et va jusqu’à employer le terme de « ministère éducatif » pour décrire la responsabilité des parents chrétiens. Voici la partie de Familiaris consortio qui traite explicitement de l’éducation. Le droit des parents à l’éducation de leurs enfants est lié à la transmission de la vie et il ne peut être ni délégué totalement aux autres ni usurpé par d’autres. Cette éducation doit comprendre une formation morale respectueuse de la dignité de la personne humaine et fondée sur la justice et l’amour. La communion vécue au sein de la famille prépare les enfants à vivre en société de manière responsable. Les parents ont la vocation de donner une éducation sexuelle axée sur la personne tout entière et qui souligne l’importance de la chasteté. Pour les parents chrétiens, le sacrement du mariage fait de la mission éducative un « ministère éducatif ». C’est dans « l’Église domestique » que les enfants font leur première expérience d’Église. Pour accomplir ce « ministère », les parents doivent collaborer avec les autres instances éducatives : l’école (publique ou privée), les communautés chrétiennes etc. Fruit d’un Synode, ce document reflète l’expérience pastorale et la pensée des évêques du monde entier sur les tâches de la famille chrétienne. Ainsi il constitue, avec la Déclaration sur l’éducation chrétienne (voir plus haut, p. 4-13) qu’il cite souvent, un des textes de référence pour toute réflexion sur le rôle des parents et de la famille dans l’éducation chrétienne. Texte français distribué par la Polyglotte vaticane. Titre de Questions actuelles. Pour le texte intégral de Familiaris consortio, voir DC 1982, n° 1821, p. 1-37. RÉSUMÉ PERSPECTIVES FICHE DE LECTURE Le « ministère éducatif » des parents chrétiens Dans sa «Lettre aux Familles» de 1994, Jean-Paul II, en abordant la question du rôle des parents dans l’éducation religieuse de leurs enfants, écrit ceci : (…) La famille est appelée à remplir sa tâche éducative dans l’Église, prenant ainsi part à la vie et à la mission ecclésiales. L’Église désire éduquer surtout par la famille, habilitée à cela par le sacrement du mariage, avec la « grâce d’état » qui en découle et le charisme spécifique qui est le propre de toute la communauté familiale. L’un des domaines dans lesquels la famille est irremplaçable est assurément celui de l’éducation religieuse, qui lui permet de se développer comme « église domestique ». L’éducation religieuse et la catéchèse des enfants situent la famille dans l’Église comme un véritable sujet actif d’évangélisation et d’apostolat. Il s’agit d’un droit intimement lié au principe de la liberté religieuse. Les familles, et plus concrètement les parents, ont la liberté de choisir pour leurs enfants un modèle d’éducation religieuse et morale déterminé, correspondant à leurs convictions. Mais, même quand ils confient ces tâches à des institutions ecclésiales ou à des écoles dirigées par un personnel religieux, il est nécessaire que leur présence éducative demeure constante et active. Pour le texte intégral de la Lettre du Pape Jean-Paul II aux Familles, voir DC 1994, n° 2090, p. 251-276. (Voir aussi « Pour aller plus loin, p. 13) LA FAMILLE ET L’ÉDUCATION RELIGIEUSE de l’amour authentique, qui est fait d’attention sincère et de service désintéressé à l’égard des autres, en particulier des plus pauvres et des plus nécessiteux. La famille est la première école, l’école fondamentale de la vie sociale ; comme communauté d’amour, elle trouve dans le don de soi la loi qui la guide et la fait croître. Le don de soi qui anime les époux entre eux se présente comme le modèle et la norme de celui qui doit se réaliser dans les rapports entre frères et sœurs, et entre les diverses générations qui partagent la vie familiale. La communion et la participation vécues chaque jour au foyer, dans les moments de joie ou de difficulté, représentent la pédagogie la plus concrète et la plus efficace en vue de l’insertion active, responsable et féconde des enfants dans le cadre plus large de la société. (100) Constitution pastorale sur l’Église dans le monde de ce temps Gaudium et spes, 35. l’amour paternel et maternel, qui trouve dans l’œuvre de l’éducation son accomplissement en complétant et en perfectionnant pleinement leur service de la vie. De source qu’il était, l’amour des parents devient ainsi l’âme et donc la norme qui inspirent et guident toute l’action éducative concrète, en l’enrichissant des valeurs de douceur, de constance, de bonté, de service, de désintéressement, d’esprit de sacrifice, qui sont les fruits les plus précieux de l’amour.