Lu sur liberté politique :
Quelques semaines n’étaient pas de trop pour mesurer la portée du témoignage produit par Mgr Carlo Vigano , archevêque et ancien nonce apostolique à Washington, au sujet des réseaux homosexuels et de leurs soutiens dans l’Eglise.
C’est un document très grave que très peu se sont avisés de mettre en doute, tant l’archevêque a une réputation de rigueur. Le pape n’ a pas voulu le commenter. Tout au plus certains murmurent-t-ils que le nonce serait un conservateur aigri, mais sans remettre en cause le contenu de ses déclarations.
A un moment où tout le monde revendique la transparence, comment reprocher à Mgr Vigano d’avoir parlé comme il l’a fait ? N’est-ce pas la déférence hiérarchique et la crainte du scandale qui sont à l’origine de toutes les formes d’omerta condamnées aujourd’hui à juste titre. Et le 5e commandement, qui impose d’honorer son père, qu’il soit digne ou non, n’interdit pas la lucidité .
Les médias du mainstream international, qui veulent garder un pape favorable à la thèse du réchauffement climatique et aux migrations, ont vite changé de sujet. Il leur sera cependant difficile de résister à la pression de la base et même d’une partie de la hiérarchie qui, surtout aux Etats-Unis, réclame que toute la vérité soit faite. On ne saurait en en tous les cas mettre au panier le document Vigano sans examen.
Que faut-il en retenir ?
D’abord qu’il existe bien quelque chose comme un réseau homosexuel ou pro-homosexuel ( n’employons pas le mot gay dans une si triste affaire) , tissé par cooptation , sinon dans l’Eglise universelle, du moins aux Etats-Unis et à la Curie, ce dont beaucoup jusque-là doutaient. L’ancien nonce n’hésite pas à employer le mot de mafia.
Ensuite cette idée très politiquement incorrecte que ce réseau recouvre assez largement aujourd’hui l’aile dite progressiste de l’Eglise, au moins aux Etats-Unis[1]. Une exception est citée. Le plus étonnant est que, pour dire cela, Mgr Vigano se fonde sur une confidence du pape François lui-même , non démentie : « quand je dis de gauche, je veux dire homosexuel ».
Glissement pouvant être également sujet à controverse de l’homosexualité à l’abus d’enfants dont les victimes sont , selon une étude du John Jay Criminal Justice College , à 80 % des garçons.
Le rôle central de MacCarrick
Il ressort clairement du rapport qu’un personnage joue et a joué un rôle clef dans ces dérives : Théodore McCarrick , ancien archevêque de Washington et ancien cardinal [2]. Benoît XVI avait bien pris des mesures contre lui , lui imposant une vie de prière et de pénitence , lui interdisant toute apparition ou déclaration publiques. L’ autorité chancelante de l’ancien pape pourrait avoir réduit la portée de ces mesures. Toujours selon Mgr Vigano, l’ancien archevêque de Washington, avait été auparavant protégé par de proches collaborateurs de Jean-Paul II vieillissant : Sodano, Bertone.
L’élection du pape François a été accueillie avec satisfaction par le membres du réseau évoqué , ce qui ne veut pas dire qu’ils l’on fait élire – en avaient-ils les moyens ? A tout le moins y ont-ils contribué, peut-être en appui d’autres réseaux.
Le pape François a , sinon en droit, du moins de fait , levé les sanctions dont faisait l’objet Mgr McCarrick , allant jusqu’à en faire son conseiller officieux. Il aurait été chargé d’une mission en Chine par le pape et même en Centrafrique par …le Département d’Etat, selon les déclarations de l’intéressé que l’âge a pu rendre quelque peu cabotin .
Jusqu’à quel point est allée cette collaboration avec François ? C’est sur la suggestion de McCarrick qu’ont été apparemment désignés aux Etats-Unis plusieurs nouveaux évêques[3] de la mouvance progressiste ( c’est ainsi que leur nomination avait été présentée en son temps ), deux dont Mgr Joseph Cupich, archevêque de Chicago, ayant été nommés immédiatement cardinaux.
Il avait été dit qu’ils étaient plus sensibles au souci de combattre les inégalités ou l’exclusion que de rappeler la morale sexuelle de l ’Eglise, comme si la discrétion sur cette dernière était une garantie d’esprit social . Jésus a interdit le divorce , était-il pour cela moins tourné vers l’amour des pauvres ?
D’autres, de la même mouvance , tel l’actuel archevêque de Washington, Mgr Wuerl, successeur de McCarrick et sans doute coopté par lui, avaient été désignés plus tôt.
Non contents d’être promus aux Etats-Unis , les prélats de cette orientation l’ont été depuis 2013 à la Curie, à des postes clef où se fait le choix de évêques.
Mgr Vigano pense que le pape François ne pouvait pas ignorer qui était Mgr McCarrick, ce qui est assez vraisemblable.
En parallèle avec la société
S’il y a bien une organisation en réseau de gens se cooptant à des postes élevés , ceux qui sont ou ont peut-être été il y a plusieurs décennies, à origine de ces réseaux sont-ils de bons prélats dévoyés ou bien des infiltrés dont le but était dès le départ de saper l’Eglise de l’intérieur ? Voilà quelque chose qu’on n’aurait pas imaginé il y a quelque années. Un George Soros n’a pourtant pas caché son intention d’influencer l’Eglise catholique en interne. Sans tomber dans le complotisme, il se peut que les scandales actuels viennent moins d’une corruption interne que d’une offensive délibérée. Difficile d’entrer dans la conscience de quelqu’un comme Théodore MacCarrick. Il est cependant probable que si infiltration il y a , elle sera plus facile à un homosexuel qu’à un homme qui aurait vocation au mariage, lequel aura autre chose à faire qu’à porter une fausse soutane toute sa vie.
Comme une telle infiltration n’a pu se faire d’emblée au plus haut niveau de la hiérarchie, elle semble concomitante des débuts du mouvement homosexuel, soit les années soixante-dix et quatre-vingt. Le tempo de l’Eglise est en phase avec celui de la société.
Sans que cela soit dit explicitement , on pressent dans ces turpitudes l’importance des questions d’argent. Non que les intéressés auraient agi par appât du gain, mais du simple fait que l’Eglise de Rome dont les charges sont très lourdes tire depuis longtemps le diable par la queue – expression particulièrement appropriée ! Or sa principale ressource financière se trouvant aux Etats-Unis, cela donnait un poids considérable à un MacCarrick président la Papal Foundation et qui semble avoir eu beaucoup d’entregent pour mobiliser des donateurs riches.
Des complaisances analogues sont relevées en Italie, au Chili ou encore au Honduras, pays de l’influent cardinal Madariaga très proche du pape et également mis en cause par l’ancien nonce.
La responsabilité du pape Francois dans la tolérance des dérives évoquées semble lourde. Ce que l’on reproche au cardinal Philippe Barbarin , archevêque de Lyon, la non dénonciation d’un curé de paroisse repenti et amendé depuis plus de trente ans , n’est en comparaison qu’une peccadille.
Nous n’avons pas qualité pour demander, comme le fait Mgr Vigano, au pape François de démissionner. A d’autres époques, quand l’Eglise voulait se purger, elle dressait des bûchers, y compris pour certains évêques. Ce n’est évidemment plus de saison. Mais ce ne sont pas quelques repentances de plus , exercice de moins en moins crédible, qui videront l’abcès. L’actuel pape est peut-être mieux placé que quiconque pour révoquer avec la dernière énergie tous ceux qui sont compromis avec les réseaux dont il est question, même si c’est lui qui les a nommés . Au niveau le plus élevé, l’ingratitude, si ingratitude il y a, peut être une vertu comme l’avait montré en son temps saint Thomas Becket. Le Saint Père apporterait ainsi la preuve qu’il est libre.
Roland HUREAUX
[1] Ce n’était pas le cas au temps du père Maciel, réputé conservateur.
[2] Il a démissionné de cette fonction en 2018.
[3] Notamment Chicago, Newark, San Diego.