La vérité n’a pas bonne presse aujourd’hui. Fake news, manipulations, amalgames, désinformations, relativisme, sont une liste non exhaustive des prédateurs des reliques de la vérité qui subsiste encore, vaille que vaille, dans le cœur de l’Homme. La vérité dérange, déplait, inquiète, fait peur, désarçonne plus encore aujourd’hui qu’hier. Ce n’est pas qu’il y ait plus de menteurs qu’autrefois, mais le contenu de la vérité est tellement sorti du quotidien de notre société que lorsqu’elle y revient c’est comme par effraction et la vérité semble un crime agressant le virtuel acquis comme réel par un monde construit sur pilotis d’illusions. Ainsi, comme la vérité est devenue un épouvantail, celui qui la défend apparait comme un prophète de malheur contre lequel le monde bataille. Nous pourrions ici nous souvenir des nombreux prophètes de l’Ancien Testament pourchassés parce qu’ils rappelaient au monde d’alors la vérité du monde créé, pensé et voulu par Dieu.
La vérité n’est pas aimée parce qu’elle est, avant toute autre chose, un révélateur sur soi. La vérité passe sur notre vie un rayon x imparable, par lequel les béances et maladies de notre âme sont mises à nues. Face à ce scanner, il y a ceux qui le refusent et le combattent, préférant les sécurités illusoires de la jambe de bois et les béquilles improvisées, au scalpel, toujours douloureux, du médecin. Mais il y a ceux, aussi, de plus en plus nombreux, qui ne comprennent pas le diagnostic, parce que le monde réel, que présente la vérité, leur est, aujourd’hui, totalement étranger. Si la vérité nous révèle, elle se découvre et se reconnait. Quels outils nos contemporains ont-ils à leur disposition pour appréhender le réel quand, dès le plus jeune âge, ils sont armés pour la fuite dans le virtuel et le faux-semblant ? Comme le mensonge a déconstruit l’intelligence, il nous faut déconstruire le mensonge, mais pas seulement. Quand on a une idée du vrai, on peut débusquer le faux, mais quand on a aucune idée de ce à quoi ressemble la vérité, dénoncer le mensonge ne suffit pas. Il faut rééduquer au vrai, au bien. « Dénoncer ne suffit pas, il nous faut éduquer ». C’est bien pour cela que la réinformation qui s’oppose à la désinformation, l’éducation qui veut répondre aux intoxications des masses sont pourchassées par les censeurs du faux qui parfois, comme saint Paul du reste, persécute en toute bonne foi les hérauts de la vérité.
Pourtant, ne nous y trompons pas, le martyre de ce siècle n’est pas seulement le non reniement du Christ, il est assurément la défense de la vérité. Et ceux qui auront le courage et plus exactement l’amour de se « croiser » pour elle doivent s’attendre à de sanglantes couronnes. Face à la désorientation du monde et de nos contemporains, la vérité comme lumière est la seule boussole. Le Christ ne nous l’a-t-il pas dit ? « Je suis le chemin, la vérité, la vie », entendons, je suis le chemin parce que la vérité et la vie parce que la vérité. Une vérité qui comprend les lois naturelles comme le sacrifice salvifique du Christ. Du reste, tenir l’un sans l’autre est, lui aussi, une négation de la vérité.
Cyril Brun, rédacteur en chef.