Chrétien ou catholique ? Pour le fidèle, la réponse pourrait sembler assez claire. Le catholique est nécessairement chrétien, mais le chrétien n’est pas assurément catholique. A la lecture des interviews, des tribunes, des échanges ou encore des tweets et autres posts sur Facebook, les personnalités et même l’internaute anonyme, bien que catholique se présentent plus volontiers comme chrétiens. Ce n’est évidemment pas faux, mais, depuis quelques siècles, c’est incomplet et (volontairement) flou. Il y a derrière ce choix plusieurs raisons, conscientes ou non. La première et pas des moindres, est l’habitude prise par les uns et les autres d’employer le nom de chrétien et ce reflexe est plus devenu une mode verbale qu’une réelle intention. Néanmoins, cela participe de la dilution et de l’effacement d’une certaine présence catholique dans le paysage ordinaire de la France d’aujourd’hui. D’autres motifs viennent renforcer cet habitus linguistique. Des motifs, parfois idéologiques, voudraient gommer les distinctions entre les catholiques et les autres chrétiens, parce que nous sommes, en effet tous frères, ou parce qu’il serait temps que l’Eglise catholique évolue. Chose, remarquez, qu’on ne demande pas aux autres Eglises, bien souvent. A côté de raisons syncrétistes, une vraie volonté œcuménique se nourrit d’un désir profond de solidarité avec les chrétiens persécutés. Cette volonté de faire corps renforce la visibilité et le poids global des chrétiens. Plus diffus, nous trouvons, sous-jacent, le manque de connaissance de leur foi chez nombre de catholiques, comme nous le reprochent bien souvent les protestants. Ce déficit rend moins nettes les distinctions majeures qui existent entre les confessions chrétiennes et atténue l’adhésion à l’Eglise. Mais il y a un autre motif. Être chrétien passe encore, mais être catholique est une flétrissure abjecte dans le monde actuel. Qui se dit chrétien est reconnu pour ses qualités de cœur et d’altruisme, quand le catholique (pourtant chrétien) est enfermé dans une vision rigoriste et moraliste. Face au vade retro catholique, certains fuient, comme les apôtres au soir de la Passion. D’autres tentent de passer entre les griffes du couperet bien-pensant et mettent en avant plutôt le nom de chrétien que celui de catholiques. Il n’est pas inintéressant de nous demander pourquoi nous employons tel nom plutôt que tel autre. S’il est clair qu’on veut éradiquer les catholiques de l’espace public, nos choix ne sont pas neutres quant à la visibilité de l’Eglise et le démon, qui pilote cette « discrimination », le sait très bien.