L’édito – L’Eglise vous accueille aux heures de bureau

L’édito – L’Eglise vous accueille aux heures de bureau

 

 

« Ces églises et cathédrales qui ferment entre midi et deux heures, c’est à dire pile quand les gens pourraient aller faire une pause prière … c’est comme la messe du jour à 9h où 18h …. et après on dit que l’Eglise c’est pour les vieux ! C’est sûr avec ces horaires pour retraités…. la logique ecclesiastico-financiero-fonctionnaire me dépasse … »

Telle était la réaction spontanée d’un jeune professionnel qui venait de se casser le nez devant la cathédrale d’une grande ville fermée entre midi et deux. Ce n’est pas à vrai dire un mince problème. Aujourd’hui, les églises sont parfois fermées dans les campagnes retirées, faute de fidèles disponibles pour les ouvrir ou les fermer ou simplement de permanents pour les surveiller. Dans les grandes villes, elles ouvrent aux horaires de bureaux, parce que le personnel doit prendre sa pause, ou les bénévoles retourner s’occuper de leur famille. A cela convenons, il est vrai, que les horaires de messe ne sont pas faits pour ceux qui travaillent. Une messe à 8 heures est trop tard pour beaucoup. Une messe à 18 heures est trop tôt pour un certain nombre.  Et finalement celui qui travaille se retrouve bien souvent comme face à l’administration qui vous enjoint de vous contenter des horaires pour le coup très restreints de leurs guichets.

Dans son rapport sur les églises qui font l’Eglise, Mgr Habert invitait à se poser la question de la permanence de vie dans les plus petites églises fussent-elles perdues au fin fond des campagnes de France. On pense souvent à l’accueil des non catholiques, parce que nous saisissons l’enjeu de l’évangélisation par le patrimoine. Mais à cette réflexion missionnaire, ne pourrions-nous pas ajouter la question des besoins spirituels des fidèles tenus par des obligations professionnelles ? Il est en effet fort difficile de se retirer pour prier dans un emploi du temps serré et une ambiance générale peu propice. Trouver portes closes aux rares moments libres, comme la pause déjeuner, la sortie du travail, n’aide pas non plus à enraciner sa vie spirituelle. Derrière cette question se trouve finalement celle de l’usage du bâtiment église et du rapport que ceux qui en ont la charge ont avec cet usage. Plus profondément, nous retrouvons l’épineuse question de la professionnalisation de ce qui autrefois étaient des services d’Eglise et, au-delà, de la notion même de service. C’est vrai que l’église est de moins en moins riche et que les diocèses sont aux abois, mais une autre façon de donner au denier, ne serait-elle pas aussi le service du temps ? S’engager coûte toujours cher. Le bénévolat ne se limite pas à donner de son temps, nous le savons. Tous les faux frais, sont aussi un don du bénévole. Le temps offert en service est également un temps où l’on ne gagne pas sa vie, précisément parce qu’on la donne. Peut-être y a-t-il là une forme à creuser de don qui, s’il n’est pas sonnant et trébuchant, entre bel et bien dans un cahier de compte. Une demi-heure offerte par 70 paroissiens c’est un salaire temps plein charge comprise. Peut-être ainsi ce jeune pro agacé trouverait-il moins de portes closes sur la pause déjeuner. Peut-être aussi pourra-t-il donner sa demi-heure de 18h00 à 18h30 pour que d’autres trouvent l’église encore ouverte en sortant du travail. Comme Benoît XVI nous le rappelait dans Caritas in veritate, le don est multiforme et l’économie du don est l’avenir de l’économie.

 

Cyril Brun, rédacteur en chef

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