Le pape François vient donc de sortir une nouvelle exhortation apostolique que certains n’hésitent pas à qualifier d’exaltante, d’enthousiasmante et de nouveauté, quand d’autres mettent en garde ou y voient des piques contre les opposants au Saint-Père. C’était finalement presqu’inévitable et nous nous y attendions. Le pape cite le missel tridentin, Leon Bloy, saint Thomas d’Aquin pour exhorter à la sainteté. Une sainteté du quotidien qui, contrairement à ce que déjà (soupir) nous entendons ici ou là n’oppose nullement vie contemplative et vie active, œuvre de miséricorde et participation au culte. Les sacrements sont bien la source qui féconde la vie active, celle de notre quotidien le plus ordinaire. Et en cela, rien de nouveau sous le soleil, c’est toute l’œuvre d’accompagnement spirituel de saint François de Sales, docteur de l’amour, qui ouvrit grand les portes de la sainteté aux laïcs. Pour éviter d’opposer œuvre de miséricorde et vie spirituelle en Dieu, peut-être est-il bon de se pencher sur l’éclairante étymologie qui, finalement, nous place devant une ultime question. Miser -corde : un cœur qui a pitié (rappelons que Sagesse c’est un cœur qui écoute) Mais au fond qu’est-ce que la pitié ? Là encore l’étymologie nous éclaire : avoir compassion de la misère (laquelle se rapporte à souffrance-faiblesse-détresse)
La miséricorde est donc un cœur qui a compassion de la faiblesse, de la détresse.
Ainsi, implorer miséricorde c’est demander à l’autre d’avoir un cœur qui a compassion de la faiblesse. Donc implorer la miséricorde divine c’est demander à Dieu non d’être indulgent pour nos péchés et de les effacer, comme ça « l’air de rien ». C’est lui demander d’avoir compassion de la source même de notre faiblesse afin que, certes il soit indulgent pour nos circonstances atténuantes, mais surtout pour que sa grâce touche la racine de notre faiblesse, de notre souffrance. Autrement dit, nous ne demandons pas un blanc-seing, mais d’être remis dans les conditions de liberté et de paix pour avancer vers Dieu. Voyez comme c’est intéressant ! C’est exactement la demande du psalmiste. Le psalmiste nous apprend que l’état ordinaire de l’homme c’est la louange et toutes ses demandes visent à se retrouver dans l’état naturel qui lui permet de louer Dieu.
Alors question : quand je supplie la miséricorde de Dieu, est ce que je demande l’impunité pour avoir la conscience tranquille ou la guérison et la force pour retrouver le chemin qui mène à ce cœur à cœur que le psaume 50 (dit miserere) pleure d’avoir perdu ? Parce que selon l’intention de notre demande Dieu répond. En bref si ce n’est pas la guérison en vue de l’amour que nous demandons il est probable que la grâce ne trouve pas en nous un cœur accueillant et fasse d’une certaine façon… chou blanc. De la même façon, nos œuvres de miséricorde considèrent la détresse de l’autre, non pas pour la soulager uniquement, mais pour aider autrui à avancer vers Dieu, c’est-à-dire, au fond à s’unir au Christ, notamment par la vie sacramentelle et de grâce. Il y a bien une unité profonde entre l’union amoureuse à Dieu, qui s’exprime pleinement dans la communion eucharistique et la vie contemplative, les œuvres de miséricorde envers autrui et la miséricorde de Dieu envers nous. C’est une seule et même sainteté. Gaudete et exsultate ! Nous trouvons notre bonheur dans le bonheur de l’autre. bonheur qui nous est commun, Dieu.