S’il est un moment de grâces entre tous, c’est bien Noël. Les plus grands compositeurs de tous les temps ont voulu à leur façon le célébrer. A leur façon, mais aussi selon leur foi (luthérienne ou catholique) et leur propre vision ou relation à Dieu. Sans remonter aux noëls médiévaux ou grégoriens, voici quatre immenses compositeurs, pour quatre périodes et pour finalement quatre expressions du mystère divin. Ce que l’on pourrait dire du Dieu de ces compositeurs se retrouve ici, devant la crèche, entre le bœuf et l’âne gris. Toutefois, notons que les thèmes retenus sont souvent les mêmes : Hérode, l’Annonciation, la Nativité, l’adoration, les anges ou encore la fuite en Égypte.
Si Bach s’inspire profondément des Écritures pour son oratorio, Berlioz écrit lui-même les textes de son Enfance du Christ. C’est qu’il ne s’agit plus d’une méditation exégétique comme le fera encore Beethoven dans son Incarnatus est de la Messe en Ut. Berlioz raconte aux chrétiens l’Histoire Sainte.
« Vraiment, dit Berlioz à sa sœur, au sujet du repos de la Sainte Famille, c’est naïf et touchant (ne ris pas), c’est dans le genre des enluminures des vieux missels. Tout le monde dit que j’ai parfaitement saisi la couleur convenable à cette légende biblique ; et l’on me presse de continuer cet ouvrage en faisant maintenant la Sainte Famille en Égypte. Je le ferai volontiers, car ce sujet me charme, quand j’aurai trouvé les documents qui me manquent sur le séjour de Jésus en Égypte ; c’est moi qui fais aussi les paroles. Si je trouve mon affaire, voila une partition toute convenable pour être dédiée à mes nièces ; et cette raison seule me déterminerait à l’écrire puisqu’il leur est agréable de voir leur nom sur une de mes œuvres. »
Quand Berlioz parle de légende biblique, il faut se référer à la Légende dorée de Chrétien de Troie.
Mais avant de fuir en Égypte, demeurons un instant avec les bergers de ce trop peu joué oratorio de Noël de Camille Saint-Saëns.
La fresque imaginée par Saint-Saëns amplifie l’expression de la grâce : c’est une ferveur parfois dramatique et donc inquiète (Expectans) et même puissante (Quaere Fremuerunt). Plusieurs épisodes sont éblouissants d’une intense sobriété. La pureté de l’inspiration mélodique évoque Berlioz qui lui-même cherchait à retrouver l’esthétique néo classique, reprenant, recréant les auteurs baroques.
Retrouvez la suite de cette médiation sur Cyrano.net