En Belgique, le Conseil supérieur de la santé vient d’émettre un avis concernant le « dépistage généralisé en contexte de procréation ». Ce dépistage est proposé pour identifier les futurs parents en bonne santé porteurs d’une maladie génétique récessive.
Ces tests génétiques préconceptionnels, remboursés, doivent permettre d’identifier « des troubles graves autosomiques et liés à l’X récessifs chez les couples ayant un projet de grossesse ». Ce dépistage pourra être élargi aux couples suivis pour des questions de fertilité ou pour une maladie génétique connue, qui pourraient également « bénéficier de l’identification d’autres risques génétiques susceptibles d’affecter leurs enfants ».
La pertinence de cette démarche et son systématisme ne lassent pas d’étonner, car elle s’apparente clairement à un procédé eugéniste : il s’agit d’éclairer les parents, avant la conception de leur futur bébé, afin qu’ils puissent prendre « des décisions en matière de procréation ». Le procédé est justifié par les auteurs de l’Avis en ce qu’il doit leur permettre « de renforcer leur autonomie en matière de procréation » : l’Etat se met en situation de dépister des maladies qui sommeillent potentiellement chez des porteurs sains, sans antécédents familiaux, pour inviter les couples à ne pas avoir d’enfant, à recourir à la Procréation médicalement assistée (PMA) avec despistage pré-implantatoire, ou bien, en dernier recours si la femme est enceinte, à interrompre la grossesse… Le Comité estime en effet que le dépistage génétique « doit être réalisé pour des troubles suffisamment graves pour justifier une adaptation des projets en matière de procréation », et qu’il devra « se concentrer sur les troubles qui se manifestent dans la petite enfance plutôt qu’à l’âge adulte ». Sur la base de quels critères ces choix sont-ils opérés ?
La motivation économique de cet avis pointe dans un discours qui se veut bienveillant puisqu’il vise à éviter toute souffrance. En effet, le dépistage doit « comprendre des troubles graves pour lesquels des interventions thérapeutiques existent, lorsque le traitement peut générer une importante charge physique, émotionnelle ou financière »…
Cependant, quelle fiabilité accorder à ces tests ? Quelle sera la part d’enfants qui ne verront pas le jour dans la crainte de les savoir potentiellement imparfaits, puisque malades ? Quels nouveaux ressorts de culpabilité vont s’imposer aux parents qui ne souhaiteront pas entrer dans ce marchandage affectif et financier ? Toute vie, même fragile, ne vaut-elle pas d’être vécue ? En ouvrant sur un monde encore irréel mais terrorisant, ce document laisse une impression nauséeuse.
Timidement, les auteurs reconnaissent que « l’identification du statut de porteur d’un individu en bonne santé peut impliquer des questions éthiques et juridiques importantes » et il préconise de de demander l’avis du Comité consultatif de bioéthique. Quelles seront ses conclusions ?
Pour l’heure, une étude pilote doit être mise en place pour réfléchir aux questions juridiques, éthique et de vie privées, définir les troubles à dépister, organiser le Conseil préconceptionnel, évaluer l’impact économique…