L’Eglise en Erythrée vit actuellement dans l’attente. Après l’accord de paix avec l’Ethiopie, la situation s’est cristallisée. De la part des autorités, on n’a pas eu affaire à des répressions particulières mais pas même à des ouvertures, Le Père Mussie Zerai, prêtre de l’Eparchie d’Asmara, décrit de la sorte à l’Agence Fides la situation vécue par les catholiques dans le pays d’Afrique orientale. « La paix entre Asmara et Addis Abeba avait suscité de grandes attentes – indique le prêtre – mais pour l’heure, aucun signal d’amélioration n’a été lancé. La liberté d’action de l’Eglise est encore toute entière à conquérir ».
L’Erythrée est l’un des pays les plus pauvres du monde, avec un PIB pro capite de quelques 800 USD par an seulement soit moins de 70 USD par mois. Une bonne partie de ses citoyens survit grâce aux sommes provenant de parents qui sont parvenus à fuir et à trouver du travail en Europe. De fait, l’une des rubriques les plus significatives de l’économie nationale consiste dans les petits capitaux étrangers qui arrivent de la part des expatriés. La sécheresse persistante et le changement climatique général de la région provoque actuellement une perte consistante et permanente en ressources naturelles. Ceci ne fait qu’empirer une situation économique dont désormais il ne semble pas qu’elle ait connu une reprise. Selon les données de l’UNICEF relatifs à juin 2017, 22.700 enfants de moins de 5 ans se trouveraient dans un état de malnutrition aigüe.
L’Erythrée est également l’un des pays les plus militarisés du monde et se trouve sous la surveillance spéciale de l’ONU à cause des tortures infligées de manière systématique aux détenus, opposants ou non. Human Rights Watch a qualifié le régime érythréen de « l’une des plus féroces dictature du monde », laquelle gère 361 prisons et centres de détention. La liberté de la presse a également été réduite et à Asmara n’existent plus de correspondants de presse étrangers occidentaux depuis 2010.
L’Eglise, outre à l’activité pastorale, mène de nombreux projets dans le domaine social. Elle gère des écoles, des cliniques, des dispensaires, des cabinets médicaux et promeut des activités de soutien aux plus faibles – femmes, orphelins, malades du SIDA et lépreux, pauvres. En 1995, les autorités ont approuvé une loi qui intégrait à l’Etat toutes les activités dans le domaine social. Au fil des ans, la norme n’a pas été appliquée mais elle demeure une épée de Damoclès sur la tête de l’Eglise qui risquait à tout moment de se voir exproprier de ses activités dans le secteur. « On espérait que cette loi soit abrogée – continue le Père Mussie Zerai – mais au contraire, elle est encore en vigueur. Dans certaines régions, les gouverneurs, considérant les besoins importants de la population et les carences des institutions publiques, ferment un œil et permettent aux catholiques de continuer leurs actions sociales. Dans d’autres, en revanche, elles sont constamment dérangées. En tant qu’Eglise, nous devons par suite vivre au jour le jour et espérer pouvoir continuer notre action en faveur de la population ».
Si le cadre général à l’intérieur du pays est incertain, quelque chose change dans les relations entre l’Erythrée et l’Ethiopie. La semaine passée, S.Exc. Mgr Menghesteab Tesfamariam, Eparque d’Asmara, s’est vu accorder le visa pour se rendre en Ethiopie afin d’y rencontrer S.Em. le Cardinal Berhaneyesus Demerew Souraphiel, Archiéparque d’Addis Abeba. « Les deux Eglises sœurs – continu le Père Zerai – sont parvenues à se confronter directement pour la première fois en vingt ans. Il s’agit d’un petit pas important si nous pensons qu’en automne, les autorités érythréennes n’avaient pas accordé à l’Eparque érythréen l’autorisation de se rendre à l’étranger pour la rencontre des représentants des Conférences épiscopales d’Afrique orientale. Notre espérance, en tant que catholiques, est que l’Etat s’ouvre et concède de nouveaux espace de liberté aux citoyens ». (EC) (Agence Fides 23/02/2019)
Source : FIDES