S’il est une spiritualité qui est bien mal reçue c’est bien celle du Sacré Cœur. Parfois récupérée, quelque fois galvaudée, régulièrement dévoyée, la spiritualité du Sacré Cœur est mal comprise par bien des fidèles. Il faut dire qu’elle pâtit de l’engouement que lui porta le XIXème siècle qu’on se plait aujourd’hui à décrier.
Mais au XIXème siècle plus que la spiritualité, c’est la dévotion qui irriguait la vie de la plus reculée des paroisses. Une dévotion qui oscille entre superstition et amour d’une grande profondeur poussant bien des fidèles à une consécration personnelle ou collective. Et c’est bien l’ambiguïté de cette spiritualité toute particulière. La spiritualité du Sacré Cœur n’est pas simplement une spiritualité parmi d’autres, comme un des chemins de sainteté proposé par un saint. La spiritualité du Sacré Cœur est celle du Christ Lui-même, proposé par le Christ en personne. Elle est Lui-même et en ce sens tournée vers la dévotion (entendons la charité) et se revêt plus qu’elle ne se suit.
La spiritualité du Sacré Cœur n’est pas un chemin de vie, mais un véritable état de vie dans la consécration. Et par là, elle regroupe toutes les spiritualités, les surpasse, les accomplit. La grande demande qui traverse toute la spiritualité du Sacré Cœur au point de se muer en dévotion et de se plonger en consécration trouve son écho dans la demande du Christ à Sainte Marguerite Marie de lui donner son cœur.
Car la spiritualité du Sacré Cœur est un cœur à cœur amoureux, consumé d’ardeur. Ce brasier amoureux est un tison qui n’aspire qu’à embraser tous les cœurs, pour qu’enfin l’amour soit aimé. On comprend pourquoi cette spiritualité ne peut qu’être une consécration et une dévotion. Mais dévotion entendue en ce sens du XVIIème siècle, celui dont use le fondateur de l’ordre dans lequel s’est révélé cette flamme intense. Saint François de Sale, lorsqu’il titre son ouvrage de direction spirituelle, introduction à la vie dévote, il n’entend pas faire un livre de « pieusetés ». Mais lorsqu’il explique le sens de dévotion, il lui donne sa plénitude dans le degré suréminent d’amour qu’il suppose.
Pour bien comprendre cette spiritualité, il convient en effet de l’éclairer à la lumière de la spiritualité dans laquelle elle a été révélée, celle de l’ordre de la Visitation. En soit tout un programme. Un ordre fondé pour visiter, au nom de la charité, les plus démunis et qui se trouve contraint par le droit canon de l’époque de demeurer cloîtré dans la contemplation. Outre le contenu des règles et des écrits des deux fondateurs, il y a deux grands enseignements de cette histoire de fondation.
Le désir de charité se puise et retourne à la contemplation, à l’amour même de l’amour. Mais il y a un autre enseignement, intimement lié à la spiritualité du Sacré Cœur. Un enseignement qui traverse les messages parfois rudes de Jésus à sainte Marguerite Marie Alacoque. La spiritualité du Sacré Cœur est une spiritualité de l’abandon, du renoncement. Se consacrer c’est s’offrir pleinement au Sacré Cœur. C’est saint Jean Baptiste qui diminue en nous, pour que le Christ grandisse. C’est l’anéantissement de l’amour propre (ligne directrice de l’introduction à la vie dévote) pour épouser la volonté même du Sacré Cœur.
C’est se renoncer soi-même par amour et en toute confiance. Telle est la véritable spiritualité du Sacré Cœur. Telle est la véritable dévotion, amour de l’amour mal aimé. Telle est l’unique et absolue consécration.
Baudouin d’Alixan
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Edito #129 : Incompris Sacré Cœur !
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