Partout nous retrouvons dans les argumentaires en faveur de l’euthanasie l’un ou l’autre des « six raisons de légiférer » de Monsieur Comte-Sponville.
Pourtant, les arguments de M. Comte-Sponville sont fallacieux. Sous couvert de respect de la souffrance ils veulent promouvoir l’exception. C’est utiliser des arguments affectifs et non rationnels. Les conséquences de tels arguments sont bien plus graves pour le bien de toute la société. Car dédouaner les personnes privées de leur responsabilité, c’est augmenter le poids à porter par la communauté. Les crises actuelles montrent que la société ne peut plus porter les responsabilités privées et qu’elle paye, y compris financièrement, 40 ans de déresponsabilisation. Tout, aujourd’hui, est un droit et plus rien n’est un devoir. La société en est devenue de plus en plus anonyme et irresponsable, confinant les individus à l’isolement et au vide existentiel. Une telle argumentation promeut encore davantage cette déresponsabilisation égoïste en lui donnant la bonne conscience de l’altruisme. Elle exaspère ce vide existentiel qui mine le moral de nos contemporains.
La solution à la souffrance des personnes en fin de vie ou des jeunes gravement diminués, n’est pas dans leur disparition. C’est un remède trop facile qui ne soulage que ceux qui ont peur ou à qui ne sont pas donnés les moyens de s’engager à leurs côtés. L’enjeu est de donner les moyens à ces personnes de rester acteurs de l’épanouissement de leur entourage. Le rôle, irremplaçable, des grands-parents, de leur sagesse, de leur bonhommie est de fait difficile à tenir lorsqu’ils sont confinés dans des hospices. La question n’est pas simple de toute façon et elle suppose de sortir d’une logique dans laquelle nous avons presque imperceptiblement glissé. L’homme aujourd’hui n’est valable qu’en fonction de ses performances, le faible n’a plus sa place dans notre société, parce qu’il ne rapporte rien, parce qu’il nous fait peur. Il nous fait peur, parce que comme le lépreux autrefois, le faible est exclu et non accueilli.
Ce n’est pas la loi qu’il faut changer. C’est notre rapport aux autres, aux faibles. C’est notre égoïsme qui refuse de compromettre son confort et son bien-être. Combien, dans les inondations de juin 2011 en Centre Var, combien des voisins limitrophes non touchés ont déclaré, lorsqu’ils étaient sollicités : ‘ce n’est pas mon affaire’ ? Sur 500 personnes à la sortie d’une messe dans le village même…499 ! Voilà le fond du problème, notre déresponsabilisation et notre manque d’altruisme.
Qu’il faille être aidé, soutenu dans de telles démarches lorsque la question frappe nos proches, c’est une évidence. Mais n’est-ce pas plutôt cette aide là qu’il faut promouvoir et encadrer ? Ne nous trompons pas de combat, ne parcellisons pas les problèmes en ne voyant que le petit bout immédiat de la lorgnette. Il est plus facile d’aider quelqu’un à mourir que de lui donner le goût de vivre.