“Cléricalisme” ? Un prêtre diocésain s’exprime sur la crise des abus sexuels

“Cléricalisme” ? Un prêtre diocésain s’exprime sur la crise des abus sexuels

Lu sur Riposte-catholique :

Un lecteur nous a fait parvenir le texte de l’homélie donnée tout récemment par un prêtre diocésain français. En voici un large extrait dont nous estimons qu’il éclairera notre réflexion, notamment sur cette réduction abusive et dangereuse de la crise des abus sexuels au cléricalisme .

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[…] Je ferai deux remarques en rapport avec la situation actuelle de l’Église et de l’actualité religieuse récente.

D’abord, on peut se demander si nombre de catholiques ont encore la Foi théologale, celle qui consiste à recevoir de tout cœur l’enseignement de l’Évangile authentiquement interprété par le Magistère et transmis par la Tradition ? Ne sont-ils pas dans leur majorité, dans l’attitude des scribes en refusant dans l’Évangile ce qui dérange la mentalité moderne et en s’érigeant comme juge du dépôt sacré de la foi afin de l’adapter aux nécessités pastorales de notre époque, non pas que celles-ci doivent être négligées, bien sûr, mais en ce sens qu’elles deviennent la nouvelle clef d’interprétation de l’Évangile, de telle sorte que les normes objectives de la morale traditionnelle en viennent à être réinterprétées à la lumière de la subjectivité individuelle qui devient le critère ultime ? Si tout baptisé reçoit les lumières de l’Esprit Saint pour éclairer sa conscience, le charisme de vérité pour approfondir et préciser le Magistère n’a été confié par le Christ qu’à saint Pierre et aussi dans une certaine mesure aux Apôtres unis au Vicaire du Christ, pouvoir transmis à leurs successeurs.

Ce qui m’amène à la deuxième question. La violente campagne actuellement organisée par le journal La Croix pour dénoncer le cléricalisme dans l’Église, ne relève-t-elle pas de la même attitude que celle des scribes qui dénigrent toute autorité au Christ et déclare blasphématoire sa revendication ? En effet, il ne faut pas oublier que lorsque le Christ transmet ses pouvoirs, il le fait à ses apôtres et non pas à tous ses disciples et que le Sacrement de l’Ordre confère non seulement un pouvoir de sanctification et d’enseignement mais aussi de gouvernement dans l’Église (étant sauf, bien sûr, le pouvoir de juridiction relevant de l’autorité compétente), et n’en déplaise à certains, ceci n’est pas une conséquence du césaropapisme qui aurait dénaturé l’Église à partir du IVe siècle mais une organisation de droit divin de l’Église car telle qu’établie par la volonté du Christ. L’autorité dans l’Église catholique, de droit divin, est lié de façon ordinaire au Sacrement de l’Ordre, n’oubliant pas toutefois, que toute autorité dans l’Église est avant tout un service et non pas une position de domination et que ce pouvoir de sanctification et d’enseignement conféré par le Sacrement de l’Ordre est avant tout destiné aux clercs eux-mêmes qui ont un grand besoin de se sanctifier et de se convertir.

Ce qui est à craindre dans la campagne actuelle de dénonciation du cléricalisme comme cause de tous les maux qui salissent l’Église, est qu’en voulant lutter contre les excès d’autoritarisme, le désir et l’objectif, avoués ou non, sont de désacraliser, horizontaliser, protestantiser le Sacrement de l’Ordre et donc, ne nous y trompons pas, de déstabiliser et de fragiliser encore davantage l’Église, dont le Sacrement de l’Ordre constitue la colonne vertébrale. En effet, si par son Baptême tout baptisé est revêtu du Christ, le Sacrement de l’Ordre donne au prêtre la possibilité d’agir in persona Christi. Si dans l’optique protestante, le pasteur n’est qu’un super laïc, à l’origine, pour fonder son Église, Jésus-Christ institua d’abord ses Apôtres en leur donnant pouvoir de prêcher, de baptiser et d’organiser son Église. Dans la doctrine catholique traditionnelle, le Baptême est un fruit du ministère sacerdotal, et non pas l’inverse.

En fait, l’autoritarisme est un désordre qui, dans une optique chrétienne, relève du péché personnel, qui peut toucher tout homme, clerc aussi bien que laïc, et non pas la conséquence d’une pseudo structure de péché qu’il faudrait détruire, selon une analyse marxisante. La lutte contre ce mal ne consiste pas à transférer des pouvoirs (ce qui serait d’autant plus illusoire et destructeur que l’organisation hiérarchique de l’Église est de droit divin) mais de sanctifier les clercs et les laïcs. C’est la seule voie de sortie de la crise car c’est celle que l’Église a toujours pratiquée depuis 2 000 ans et qui fut la seule à porter des fruits de conversion.

Il faut relancer et intensifier le mouvement de sanctification du clergé, comme l’avait fait Saint Jean-Paul II pour contrer la crise d’identité du prêtre des Années 60-70 qui dans le contexte de relâchement moral général de la société de l’époque, fût véritablement la cause principale du glissement moral du clergé actuellement dénoncé. Ce mouvement de sanctification du clergé, qui culmina avec le préfet de la Congrégation du clergé Mgr Mauro Piacenza, a justement permis à la crise des abus et crimes sexuels commis par le clergé de connaître son point culminant au début des années 80 et d’amorcer depuis une décrue importante et continuelle dans les pays touchés par ce fléau. C’est dans le renforcement de l’identité du prêtre, et non pas dans sa dilution, et donc dans la recléricalisation de l’Église que celle-ci est sorti des marécages des dérèglement moraux. Il est à craindre que sous prétexte de lutter contre le cléricalisme, en fin de compte on en vienne à relancer la grave crise du clergé dans années 60-70 à l’origine de son terrible effondrement moral.

En fait, pour conclure, je dirais que dans ce grand débat au sujet de la lutte contre le cléricalisme, nous Français, nous avons un grand avantage sur les autres nations, car nous savons, tout au moins ceux qui connaissent l’histoire de France le savent, d’où vient l’expression «  le cléricalisme, voilà l’ennemi ! » : nous savons qu’elle vient des ennemis mêmes de l’Église, et que ceux qui l’utilisent n’en sont rien d’autres que les idiots utiles, qui malheureusement contribuent, non pas au relèvement de l’Église mais  à son délabrement. Plus précisément, une petite étude dans les médias permet de se rendre compte que cette idée de lutter contre le cléricalisme vient des milieux libéraux états-uniens liés aux lobbys gays afin justement de trouver un bouc émissaire que l’on est content d’anéantir et qui détourne l’attention de l’opinion publique de la véritable cause de la crise morale de l’Église que sont le relâchement des lois et des mœurs dans la société et dans l’Église […]

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