De Gérard Leclerc :
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 24 septembre 2018.
La liberté d’expression est la conséquence directe de la liberté de conscience et elle est normalement garantie par ce qu’on appelle l’État de droit. Voilà qui ne devrait pas prêter à discussion. Et pourtant, on peut se demander en ce moment s’il n’y a pas danger. J’en veux pour preuve telle pétition, dont j’ai déjà parlé, qui voudrait interdire au docteur Bertrand de Rochambeau d’exprimer ses convictions à propos de l’avortement. Mais l’affaire n’est pas terminée. La ministre de la Santé a condamné l’intéressé. Et une tribune libre dans Le Monde est venue renforcer le sentiment qu’il y a un réel péril pour l’objection de conscience. Cette tribune signée notamment par la co-présidente du planning familial réclame la suppression de la clause de conscience dans la loi concernant l’IVG.
Les signataires réclament de plus que les professionnels de la santé soient « formés aux enjeux sociaux de la santé sexuelle et reproductive ». Ce langage bien particulier ne trompe pas. Il a déjà été largement adopté par les instances internationales. Et il veut avoir une vertu performative. Il s’agit, en effet, d’un nouveau système de morale que l’on veut inscrire dans le droit comme absolument normatif et exclusif de toute autre conception de la morale, et particulièrement de la sexualité et de la vie. Ce qu’on réclame, c’est tout bonnement un bourrage de crane pour les étudiants en médecine, notamment les gynécologues. Ceux-ci n’auraient plus d’autre choix que celui de rentrer dans les cadres de cette prétendue santé sexuelle et reproductive. Reproductive par antiphrase, parce qu’elle est singulièrement contre-reproductive !
Il règne, plus généralement, un curieux climat en ce moment. On a souvent l’impression que le libre échange des idées est une anomalie. On serait presque obligé d’être assisté d’un avocat pour se garantir d’un procès en justice pour ses écrits et ses propos. Décidément, la liberté de penser risque de se payer de plus en plus cher. Ce n’est sûrement pas un progrès. Faudra-t-il se coaliser pour rétablir les droits d’une pensée vraiment libre ?
Source : France catholique