Message de début d’année de Mgr Olivier Schmitthaeusler, vicaire apostolique de Phnom Penh
« Combien de fois, cette année, dans notre Vicariat, j’ai vu Dieu sur les visages des plus petits et sur les visages de ceux que j’ai rencontré ! Une fois encore, en ces jours-ci, j’ai vu Dieu à de nombreuses reprises au milieu de nous : je L’ai vu dans les quelques fidèles de l’église Saint Paul, à Thmey, qui accueillaient 100 personnes pauvres et âgées, leur offrant amitié et sourires ; je L’ai vu dans des centaines de pauvres bouddhistes et musulmans qui viennent partager un moment de fraternité avec les religieuses de Mère Teresa ; je L’ai vu dans les 3.000 enfants de Takeo qui ont célébré Noël avec joie ; je L’ai vu dans la prison de Takeo lorsque bouddhistes, musulmans et chrétiens se sont unis pour encourager les détenus ; je L’ai vu au théâtre de Chomkacheang, lorsque les jeunes ont représenté la Nativité en étant filmés également par la télévision nationale » : tel est le mémorial remis par S.Exc. Mgr Olivier Schmitthaeusler, MEP, dans le message diffusé au début de cette année 2017 aux baptisés de son Vicariat apostolique de Phnom Penh.
Dans le cadre de sa lettre pastorale pour la nouvelle année, le vicaire apostolique remarque : « Dieu est ici, dans notre pays, et se fait présent dans la personne des plus petits, des plus pauvres, des handicapés lourds, des sans terre, des migrants, de nos familles parfois divisées par les infidélités, le jeu de hasard, la violence, la drogue. Dieu est sur nos lieux de travail marqués par des rancœurs destructrices et par le pouvoir. Il nous invite à devenir constructeurs d’une culture de la miséricorde », à promouvoir « la révolution de la miséricorde » remarque l’évêque.
Mgr Schmitthaeusler rappelle que la communauté catholique au sein du Vicariat a vécu un cycle de « trois années de charité » qui s’est conclu au travers de la célébration du Jubilé de la Miséricorde. « Nous sommes appelés à promouvoir une culture de la miséricorde basée sur la redécouverte de la rencontre avec les autres, une culture dans laquelle personne ne regarde l’autre avec indifférence ou ne s’éloigne de la souffrance de ses frères ». Il ajoute par ailleurs que les œuvres de miséricorde constituent une sorte de « produits artisanaux » dans le sens où elles sont réalisées par les mains des hommes et « aucune n’est faite de la même manière ». « Dieu les inspire toutes et elles ont toutes le même style et le même matériel mais chacune prend une forme différente » relève-t-il.
Le texte continue : « C’est le temps de la miséricorde. Chaque jour de notre voyage est marqué par la présence de Dieu qui guide nos pas avec la puissance de l’Esprit et la répand dans nos cœurs pour les rendre capables d’aimer. C’est le temps de la miséricorde pour chacun et pour tous. C’est le temps de la miséricorde pour ceux qui sont faibles, vulnérables et seuls », comme « pour les pauvres et les pécheurs ».
En considérant le contexte national, Mgr Schmitthaeusler rappelle qu’après le régime des Khmers rouges, « l’instruction, la culture, la religion et l’économie ont été en grande partie détruites. Aujourd’hui, 60% de la population a moins de 22 ans. Ces jeunes générations sont nées de parents qui ont vécu les difficultés de la survie » et à des époques dans lesquelles « il y a eu une rupture dans la transmission des valeurs traditionnelles ». Les nouvelles générations, explique la lettre, ont grandi en prenant comme modèles de familles ceux des séries télévisées coréennes ou des réseaux sociaux, basés sur le consumérisme, l’égoïsme et l’individualisme. C’est pourquoi il est important aujourd’hui « d’offrir aux jeunes un bon modèle de famille » observe-t-il.
Un autre point important consiste dans le « fléau de la pauvreté qui est à la base de la violence, de la toxicomanie, de l’alcoolisme et de la dépendance du jeu de hasard (…) Au travers des ONG catholiques et des groupes caritatifs présents dans chaque Paroisse, nous tentons de donner une dignité aux familles les plus pauvres afin de les aider à construire leur vie, à trouver un travail, à envoyer leurs enfants à l’école et à être en mesure de prendre soin d’eux » relève-t-il.
Il ne faut pas sous-estimer non plus le phénomène de l’émigration. « Environ 10% de la population cambodgienne se trouve en dehors du Cambodge et travaille en Thaïlande, en Corée, en Malaisie, à Singapour. De nombreux adultes laissent leurs enfants à la maison avec les grands-parents et les parents voient leurs enfants une fois par an. Comment ces enfants sans parents pourront-ils devenir de bons parents à l’avenir ? ».
Enfin, le Vicaire apostolique mentionne le défi représenté par les mariages inter-religieux. « 90% des cambodgiens catholiques ont été baptisés récemment et de nombreux catholiques se marient avec des bouddhistes. Cela signifie qu’ils proviennent d’une famille bouddhiste et retournent dans une famille bouddhiste. La préparation au mariage offre la possibilité d’enseigner la vision et les valeurs de la famille catholique et de demander d’éduquer les enfants dans la foi chrétienne. Il s’agit d’un important défi pour l’Eglise que d’accompagner ces nouveaux couples et leur donner une formation adéquate ».
« Je voudrais que notre Eglise au Cambodge devienne toujours davantage une Eglise qui suit et guide les adolescents et les jeunes au début de leur vie affective ; une Eglise qui rend témoignage à la miséricorde et à la tendresse de Dieu ; une Eglise qui soit véritablement père et mère ; une Eglise qui écoute et voit les besoins des familles, qui vive la compassion et l’empathie afin d’illuminer leur vie et leur conscience, en particulier dans un contexte bouddhiste ; une Eglise qui appelle toutes les familles catholiques à faire preuve de miséricorde, de dialogue, de solidarité et de paix ».
Source : Agence Fides