Andrea Riccardi est un historien qui préfère le présent et le futur au passé. « Vous avez le culte des origines », nous lance-t-il dans un éclat de rire un peu provocateur, alors que nous lui demandions de raconter ses souvenirs. Qui donc est l’homme qui se cache derrière la barbe du professore ? Discret et mystérieux, comme peuvent l’être les diplomates et les gens pudiques, ce célibataire est un moine laïc. Il n’aime rien tant que la vie en communauté et l’amitié fidèle, comme celle qui le lia au grand historien français de la laïcité, Émile Poulat. Parler de lui-même ne l’intéresse pas.
Il aurait pourtant beaucoup à raconter. Au fil des décennies, le professeur d’université, spécialiste d’histoire du christianisme, est devenu le leader catholique le plus influent du monde après le souverain pontife et le laïc chrétien le plus introduit sur la scène internationale et interreligieuse. Il a reçu, en 2009, le prix Charlemagne, un privilège qu’il partage avec Jean Paul II, le pape François, Václav Havel, Bill Clinton, Angela Merkel, une poignée de têtes couronnées et une belle liste de Français célèbres, de Jean Monnet et Robert Schuman à Emmanuel Macron, en passant par Simone Veil, Valéry Giscard d’Estaing ou François Mitterrand. Francophone et francophile, Européen mais aussi Romain, il a l’oreille des papes depuis le pontificat de Jean Paul II. De l’autre côté du Tibre, il fait partie des personnalités italiennes qui comptent. Ministres, chefs d’État et leaders religieux font le détour pour le consulter. Le 26 juin dernier, venu voir le pape, Emmanuel Macron avait ajouté un discret rendez-vous à son agenda : un petit-déjeuner avec le fondateur de la communauté Sant’Egidio sous les splendides fresques du palais Farnèse, l’ambassade de France.