Que nous est-il arrivé ? Que nous arrive-t-il ? Depuis mars 2016, dans
la foulée de « l’affaire Preynat », déclenchée par l’action des membres de
l’association « La Parole libérée », et à la suite des décisions prises alors
par l’assemblée des évêques, des faits d’agression sexuelle commis par des
prêtres ont été révélés, de mois en mois, dans de nombreux diocèses de
France, des faits parfois très anciens, remontant aux années 40, quelquesuns
en revanche très récents. Au-delà de la prise en charge de ces faits, y
a-t-il quelque chose à comprendre qui puisse aider l’Église catholique et
la société entière, en France et ailleurs, à sortir de l’aveuglement entretenu
jusque-là et à se reprendre à la racine pour que les pulsions sexuelles
ne soient plus une menace pour quiconque ?
Nous voudrions ici proposer une double explication synthétique qu’il
faudra ensuite vérifier à l’aune des faits eux-mêmes. Ces hypothèses établies,
nous tâcherons d’esquisser un chemin possible. Notre réflexion se
veut modeste. Elle s’appuie sur ce que nous avons pu constater et en a
les limites. Si quelques lectures et de nombreuses rencontres nous ont
aidé et guidé, nous ne voulons ici que tenter une parole sur une situation
douloureuse pour susciter d’autres réflexions. Les responsables de toutes
les institutions doivent désormais parler et agir afin que les générations
à venir puissent connaître des relations ajustées dans la vérité. En écrivant
cela, nous portons en mémoire nos rencontres ou échanges avec des
personnes qui ont été abusées par des prêtres, ou avec leurs familles. Ce
que ces personnes ont dû mobiliser en elles-mêmes pour vivre malgré
tout monte vers Dieu comme un cri à l’égard de ceux qui n’ont rien su
ou rien voulu voir. Nous pensons aussi aux prêtres coupables : ils sont
nos frères et nous avons à les porter.