InfoCatho est ravi de laisser la parole à une tradition de chant exceptionnelle qui entoure Damien Poisblaud, qui pendant longtemps a mis son talent au service de l’abbaye du Thoronet.
Cet article, tiré des hommes adorateurs, participe tout à la foi au renouveau liturgique et à la culture traditionnelle de la grande tradition du chant chrétien.
Au sujet du chant, l’anglais Jean Cotton (fin du XI° s) déclarait :
« La musique flatte l’oreille, relève l’esprit, excite les guerriers au combat, remonte ceux qui sont las et désespérés, réconforte les voyageurs, désarme les brigands, radoucit les coléreux, éloigne les pensées vaines,calme la rage des gens emportés«
Mais là n’est pas la raison d’être du chant sacré, élan vers le Créateur, mais les caractéristiques énoncées par Jean Cotton sont autant d’occasions de rendre gloire à notre Dieu avec tout ce que nous sommes. Pour aller plus loin, il est intéressant de souligner quelques remarques au sujet du chant formulées par Saint Bernard :
Le chant doit charmer l’oreille afin de toucher le cœur.
N’y voyons pas un chant qui joue sur les sentiments, mais bien plutôt l’expression d’une grande joie, Saint Bernard précisant :
Il devra réjouir les oreilles de Dieu d’un chant d’allégresse qui ressemblera à ceux qu’on entend dans les festins
(Ier Sermon sur le Cantique)
Comment ne pas nous rappeler combien ces chants sont joyeux autant que puissants. Nous pouvons même préciser qu’ils sont virils. Saint Bernard nous éclaire encore une fois sur ce fait lorsqu’il écrit :
qu’enfin tout, dans le chant sacré, soit grave, viril et affectueux, parce qu’on y traite des paroles célestes, le langage même du Saint-Esprit
Saint Bernard ridiculisait d’ailleurs la technique de fausset efféminé associée à la tradition séculaire des acrobates médiévaux et des musiciens de rue (histrions). Mais cette notion de chant viril ne se limite pas aux Cisterciens, car elle provient d’une très ancienne tradition ecclésiastique que l’on retrouve dans les indications d’Isidore pour les Lecteurs à qui ce dernier demande d’être plein de sève virile (plena succo virili (1)).
C’est pourquoi, fort de ces connaissances, nous invitons les hommes-adorateurs, et tous les hommes laïcs être plus présents au sein de la liturgie par le chant, rompant aussi bien avec des chants chargés de romantisme sentimental exaltant les « états d’âme » qu’avec un grégorien susurré.
C’est bel et bien à travers le chant de festin (céleste !) puissant et viril que nous pourrons, même si ce dernier ravit tout de même nos sens, être toujours tendu vers la seule chose qui compte vraiment : rendre gloire à Dieu à travers le culte !
(1) « Porro vox lectoris simplex erit, et clara, et ad omne pronuntiationis genus accomodata, plena succo virili, agrestem, et subrusticum effugiens sonum, non humilis, nec adeo sublimes, non fracta, vel tenera, nihilque femineum sonans, neque cum motu corporis, sed tantummodo cum gravitates specie. » De officiis ecclesiasticis, loc cit., 71.