Bien entendu la « surprise attendue » de l’élection de Donald Trump a mobilisé l’actualité catholique cette semaine. Entre le message du président-élu assurant que les catholiques trouveraient un appui dans son administration, l’accueil prudent du Vatican dans un discret « wait and see » et les réactions enthousiastes ou consternées des fidèles, comme de la hiérarchie catholique, le moins que l’on puisse dire est que le trublion américain n’est pas passé inaperçu. Un engagement réaffirmé pour le respect de la vie et un discours musclé sur l’immigration, constituent un cocktail qui bouleversé les catholiques dans leur habitude de classer un peu rapidement les uns et les autres au point de ne plus savoir où situer les priorités.
Mais les Etats-Unis ne sont pas les seules élections qui mobilisent les épiscopats nationaux. Depuis des semaines, les conférences épiscopales multiplient les déclarations ou les initiatives. En Afrique, les évêques se sont massivement engagés contre les corruptions en tous genres, ont appelé à discerner le mieux possible dans les choix électoraux. Bien entendu les pauvretés sous toutes leurs formes ont fait l’objet de tous les soins, donnant au passage une indication précise sur les formes de pauvreté pays par pays. Ainsi, au Malawi, nous découvrons les violences faites aux albinos. Au Kenya, l’épiscopat a présenté au président son manuel anti-corruption. Le Chili pour sa part est inquiet pour la démocratie. Les évêques chiliens ne sont pas les seuls à encourager les électeurs à se rendre aux urnes dont la désaffection est pour eux une menace pour la démocratie. A l’inverse, c’est bien pour protester qu’un évêque du Nicaragua a expliqué son abstention, comme 78% des électeurs du pays.
Contextes différents, problématiques propres, il n’en demeure pas moins que tous les épiscopats entrent dans l’arène politique et parfois de façon très engagée et militante pourrions-nous dire. L’Europe est globalement plus timidement intervenue alors que des sujets « brûlants » reviennent périodiquement dans les différents hémicycles nationaux ou européens. Ainsi, les évêques de France, au-delà de la lettre aux habitants de France, ne sont pas entrés dans les débats autour de la primaire de la droite et du centre, laissant le champ libre aux laïcs, qui se plaignent souvent d’être laissés à eux-mêmes dans le concert des propositions électoralistes.
Et de fait si les consignes de votes sont mal perçues, les recommandations existent bel et bien. Qu’il s’agisse des principes non négociables ou de l’obligation faite au chrétien de prendre part aux destinées de leurs nations les chrétiens sont un corps électoral à part qui, même s’il ne vote pas comme un seul homme est constitué du même substrat théologique. Sur ces fondamentaux, seule peut véritablement varier la stratégie en vue du mieux possible. Et pourtant nous sommes toujours surpris de voir les catholiques se déchirer politiquement, non à la marge sur les moyens, mais des racines aux cimes de l’arbre. Ce qui veut dire que tous les catholiques ne partagent pas la même vision ultime du bien commun et ne vont pas puiser leur action à la même source. Alors que les racines devraient irriguer de nombreuses branches se retrouvant en une même cime, nous assistons au contraire à la segmentation de surgeons parfois méconnaissables.
Si la doctrine sociale de l’Eglise n’est pas un programme politique, elle n’en est pas moins la clef de lecture et de compréhension pour l’action, nourrie à la source divine elle-même en vue de la finalité même du Corps du Christ qu’est l’Eglise, la vision béatifique. N’en déplaise aux laïcistes convaincus, si le chrétien est un animal politique, il l’est dans la mesure où cette activité politique ouvre le royaume terrestre au royaume de Dieu. La finalité du politique n’est pas de gouverner le monde, mais de donner au mode les conditions de possibilité de l’accès à Dieu. La première de ces conditions étant la promotion et la défense de la dignité humaine, dans toutes ses dimensions.
Voici peu ou prou la semaine d’InfoCatho. Une semaine encore bien politique qui traduit la vocation universelle des catholiques à être la lumière du monde et le sel de la terre. Un sel et une lumière qui bien entendu supposent, sous ce manteau actif qu’est la charité politique, une vie intime en Dieu, Lumière de nos petites lumières, Océan où aller chercher ce sel de qualité qui ne s’affadit jamais.
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Edito #4 : L’Eglise corps électoral.
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